Nicolas Barrioz attend, depuis quelques jours et avec une certaine impatience, un message de l’équipe du Guiness Book. Celui-ci doit annoncer l’homologation officielle du record du monde, inscrit durant la Fête du vélo en mai dernier place de Jaude à Clermont. Ce record, 100 mètres parcourus avec un vélo de sa conception mesurant de 8 mètres de hauteur, chasse le record précédent, établi en Pologne à 7,41. Cette performance est l’apothéose d’une longue séquence qui a débuté en 2015.
Un pari un peu dingue
Nicolas Barrioz aime le vélo sous toutes ses formes. Depuis plusieurs années, il travaille au sein de l’association Tous deux roues qui gère l’atelier d’auto réparation clermontois Un Guidon dans la Tête. C’est en 2015 qu’une idée et non un guidon, commence à virevolter dans la tête de ce bricoleur de génie qui est à la fois chaudronnier, soudeur et métallier. A l’automne 2019, il se décide à se lancer dans ce pari un peu dingue de construire le vélo le plus haut du monde et de faire « claquer » un record. Durant l’hiver, il dessine les plans de son engin et persuade le conseil d’administration de Tous deux roues de porter officiellement le projet. Un budget limité à 1000 euros et un espace de 60m² pour la construction, à plat, lui sont accordés avec la contrainte de terminer le vélo avant le déménagement de l’atelier programmé en mai 2021.
2500 heures de travail
C’est la veille du premier confinement que Nicolas arrive, in extremis, à réunir les éléments et pièces nécessaires à la construction de son vélo hors norme. En consacrant beaucoup de temps, de jour et parfois de nuit, il atteint son objectif. Le vélo est terminé, avant le déménagement, même si quelques mises au point sont encore nécessaires. Il a demandé 2500 heures de travail et 500 heures de sourcing. La bête est impressionnante : 8 mètres de haut, à la selle, 3m20 d’empattement, 3m80 de longueur avec les roues, une chaîne de 17 m pesant 8 kg et un poids total de 158 kg auquel il convient d’ajouter les kg de David Peyrou désigné pilote officiel. Seules les largeurs du guidon et du pédalier restent dans les dimensions classiques d’un vélo.
Mixer les matériaux
Après avoir envisagé et abandonné plusieurs options, le « constructeur de l’extrême » décide d’utiliser des montants en bois issus du BTP pour relier les cadres inférieur et supérieur réalisés en tubes métalliques carrés et soudés. L’ensemble, en forme de triangle, est rigidifié via des tubes en aluminium. Selle, guidon, pédalier, dérailleurs, sont issus de prélèvements sur les vélos ordinaires, les roues type VTT de 26 pouces sont renforcées et équipées de pneus très résistants fournis par le partenaire Michelin. Au final, toutes les pièces qui composent ce vélo de record bénéficient de soins attentifs, parfois de modifications pour le rendre le plus efficace et le plus fiable possible. Nicolas Barrioz a du faire preuve d’une ingéniosité peu commune pour la réalisation, ce qui lui a permis de respecter son enveloppe initiale de 1000 euros en appliquant le principe du réemploi qui est la base philosophique de Un Guidon dans la Tête.
Le Jour J
Le jour du record il faut mettre en place un dispositif technique sur la place de Jaude aussi étonnant que le vélo lui-même. Les sociétés Médiaco et Loxam ont « joué le jeu » en mettant leur matériel à disposition gracieusement. Deux grues permettent de tendre un câble sur 100 mètres d’un bout à l’autre de la place. Il sert de ligne de vie, assurant le pilote et le vélo, à la façon d’un accrobranche, alors que des Nacelles servent d’ascenseurs pour monter et descendre du vélo qui est arrivé sur la place sur une remorque spéciale tirée par un vélo à assistance électrique.
Poussée d’adrénaline
A l’heure de la tentative, le rythme cardiaque de David Peyrou s’affole un peu. Si cette autre figure de l’atelier Un Guidon dans la Tête à l’habitude d’enfourcher un grand bi, le vélo du record oblige à monter un peu plus haut en altitude. De plus, le volet sécurité impose une découverte de l’engin au moment même du record. La première tentative est un échec, car la chaîne déraille, un incident finalement assez classique sur un vélo qui ne l’est pas. « Cette première tentative m’a permis de comprendre qu’il fallait que je roule assez vite, 12/15 km/h pour gagner en stabilité et en équilibre » explique David « J’ai pris confiance dans le vélo, j’ai débranché mon cerveau, pédalé et roulé les 100 mètres nécessaires avec un rythme cardiaque très élevé à cause de la poussé d’adrénaline. Les sensation sont très curieuses sur ce vélo… imaginez la roue avant est huit mètres sous le guidon, la réactivé n’est pas celle d’un vélo ordinaire. Mais cette seconde tentative était la bonne ».
En attendant l’homologation officielle du record, Nicolas Barrioz fait les comptes de son projet. Le budget construction du vélo a été respecté mais la mise en place de la structure sécurité à coûté une belle somme. Il a du avancer la somme à titre personnel et cherche aujourd’hui des financements. Il est ouvert à toute proposition de la part de structures qui souhaiteraient monter des événements en utilisant le vélo, aujourd’hui sagement stationné dans la cour de l’atelier.
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