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1997 Equipe de la Baie des Singes / Photo DR
1997 : Equipe de la Baie des Singes. Chraz au milieu avec la moustache, Philippe Mougel à l'extrême droite./ Photo DR
Culture

25 ans de singeries ! Histoire de la Baie #1

Ce weekend, La Baie des Singes à Cournon fête ses 25 ans. Pour évoquer l'histoire de cette salle de spectacle pour le moins atypique, nous avons interrogé Philippe Mougel qui y a travaillé de 1997 à 2015 dont plus de 12 ans en tant que directeur-programmateur et homme à tout faire.

7 Jours à Clermont : Philippe, ce weekend vous faites partie des animateurs d’une grande soirée anniversaire organisée à l’occasion des 25 ans de la Baie des Singes, comment y êtes vous arrivé ?
Philippe Mougel : Avec ma Ford Fiesta rouge… en fait je connaissais Chraz depuis son passage au Château de Chazeron, en 1994 . J’organisais Les nuits de Chazeron et lui était venu jouer son spectacle de l’époque. On est devenus copains et un jour de 1997, il m’appelle et me dit « je vais ouvrir une salle de spectacle pas loin de Clermont, cela t’intéresse de venir travailler avec moi ? » J’ai immédiatement dit oui.

Premier logo Baie des Singes
Premier logo Baie des Singes

7JàC : Quelle était votre motivation pour travailler avec ce drôle de saltimbanque ?
P.M : On avait la garantie de bien rigoler… rigoler beaucoup et sans gagner d’argent cela c’est révélé parfaitement vrai. Mais c’était surtout la possibilité de vivre une aventure un peu hors norme, faire quelque chose qui n’avait  jamais été fait dans le coin, hormis peut-être avec le Petit vélo. A l’époque il n’y avait pas de lieux ou de salle de 200 ou 300 places… les salles comme Sémaphore sont arrivées plusieurs années plus tard.

7JàC : Et pourquoi Cournon ? Une opportunité immobilière ?
P.M : Oui. Chraz cherchait un bâtiment assez grand, facilement transformable en salle de spectacle, pas trop cher… même s’il avait un peu d’argent. C’est lui qui a financé tout le projet. Il n’y avait rien de tel à Clermont, alors on a fait savoir un peu partout qu’on cherchait quelque-chose et c’est la Mairie de Cournon qui a signalé qu’il y a avait un bâtiment dans Cournon en vente depuis longtemps. Chraz l’a très vite acheté avec l’aide d’une banque qui fait des crédits et qui est un peu agricole. Entre l’achat, la transformation en théâtre et l’ouverture il s’est passé neuf mois tout compris, comme dans toute conception bien menée.

7JàC : En dehors de la création d’une la salle, qu’elle était l’idée artistique en arrière plan ?
P.M : Chraz voulait programmer de l’humour parce qu’il croisait souvent des artistes dont on ne voyait jamais les spectacles à Clermont. Il souhaitait donner l’esprit café-théâtre, mais comme on aimait tous les deux la chanson, il y a eu assez vite une programmation chanson importante, avec un peu de jazz également. On a aussi programmé des choses inclassables comme un groupe de chanteurs de Mongolie et des Argentins qui jouaient du tango…mais de vrais Argentins d’Argentine.

7JàC : Vous vous souvenez du premier spectacle donné à la Baie ?
P.M : Western solo d’Alain Buttigieg. Il faisait un western à lui tout seul en jouant tout les personnages, cow-boys, indiens, pétasse du saloon… On avait choisi ce spectacle parce qu’il était muet, avec des sous- titres sur un écran. Le voisin immédiat du bâtiment avait lancé une pétition contre le futur bruit de la salle. Il avait recueilli 25 signatures. Le concept du futur bruit nous avait paru extrêmement intéressant. Il nous a fait des procès ensuite, sans trop de succès. Le second spectacle était un conteur africain, Saïdu Abatcha, histoire de poser les bases et lui montrer que l’on ne se refusait rien.

7JàC : Et pour la suite de la programmation ?
P.M : Il fallait conquérir tout le monde : les gens du spectacle et les spectateurs. Le projet avait débuté avec 0 Francs de subvention et on vivait sur les deniers restant de Chraz, donc on devait se débrouiller avec les recettes sur le principe de la co-réalisation. On a fait jouer nos carnets d’adresses, celui de Chraz était épais et il connaissait des gens connus donc assez vite, on a pu programmer des artistes avec un nom, que l’on pouvait faire jouer plusieurs soirs de suite pour remplir un peu la caisse. La confiance est arrivée assez vite, on a rarement eu des refus liés à la taille de la salle ou à l’Auvergne. Mais parfois la proposition financière faisait grimacer quand même. Le public a assez vite suivi car on avait un peu prévu le truc en programmant au départ, des artistes dont on savait qu’ils attireraient les spectateurs : Christophe Alévêque, Graeme Allwright et déjà les Bodin’s.

7JàC : La reconnaissance est arrivée assez vite ?
P.M : Finalement oui. Il y avait une sorte de bruit autour de la salle et puis les médias ont bien joué le jeu. Le projet a débuté sous de bons auspices. Cependant financièrement cela restait compliqué et l’est resté assez longtemps d’ailleurs. Pour faire fonctionner une salle de spectacle, soit on ne fait que du showbiz et on peut éventuellement faire de l’argent, soit on ne fait pas que du showbiz est c’est compliqué. Mais si la Baie est encore là 25 ans après c’est que c’était jouable.

Chraz, fin des années 90 / Photo DR
Chraz, fin des années 90 / Photo DR

7JàC : Vous aviez l’ambition de devenir le patron de la Baie ?
P.M : Non. Chraz est un formidable inventeur, il a 27 idées par minutes environ, il sait faire beaucoup de choses mais Chraz n’aime pas gérer. La Baie était son idée,  alors il est resté un moment et puis un lundi matin,  il a posé les clés sur le comptoir et m’a demandé si j’aimais bien la Baie des Singes. J’ai répondu oui, que j’aimais bien y travailler et il m’a balancé que la gestion au quotidien l’emmerdait, en ajoutant « voilà les clés, salut, démerde toi !  » Sans avoir été prévenu je me suis retrouvé un matin avec les clés du camion. Il est resté une ou deux semaines sans donner de nouvelles. C’est un peu sa manière de faire. En fait c’était trop compliqué pour lui, artiste, de dire oui ou non à d’autres artistes qui parfois étaient des copains. Cela peut aussi créer des tensions et des ambiguïtés dans le milieu. Il avait besoin de retourner sur les scènes. Mais son passage a marqué beaucoup de gens. Aujourd’hui encore, la Baie est la salle de Chraz. C’est normal car il fait ce que peu d’artistes font. Au milieu des années 90 il avait gagné un peu d’argent sur Canal+ et France Inter et il a choisi d’ouvrir une salle de spectacle au lieu de partir en voyage, acheter une maison ou une belle voiture. Du coup il a fait travailler pas mal de gens plus les milliers d’artistes qui sont passés.

7JàC :Quand Chraz est parti cela a changé quelque-chose dans la programmation ?
P.M : Non pas vraiment, si on était copain c’est parce qu’on aimait la même chose. Mais les programmations évoluent parce que le temps passe. On ne pas faire tous les ans la même chose. Au bout de 5 ou 10 ans, il y a des gens que l’on avait programmé que l’on ne programme plus parce qu’ils font autre chose…

Histoire de la Baie des singes…à suivre

 

À propos de l'auteur

Olivier Perrot

Pionnier de la Radio Libre en 1981, Olivier Perrot a été animateur et journaliste notamment sur le réseau Europe 2 avant de devenir responsable communication et événements à la Fnac. Président de Kanti sas, spécialisée dans la communication culturelle, il a décidé de se réinvestir dans l'univers des médias en participant à la création de 7jours à Clermont.

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