Retour dans le Clermont du XIXe siècle. La place de la Victoire se nomme place Impériale et la fontaine d’Urbain II n’existe pas encore. Sur une grande partie de la place, face à la cathédrale, s’élève un théâtre nommé La Comédie. C’est en 1807, que les travaux de construction de la salle ont débuté afin de remplacer la toute première Comédie place Thomas ouverte en 1759. 40 m de large, 107 mètres de long, des loges réparties en fer à cheval sur 3 étages, forment un ensemble de style Empire, d’inspiration antique avec un fronton et des colonnes. Au début du XIXe le confort moderne n’existe pas encore. Après sa mise en service, on constate rapidement qu’il fait froid dans ce bâtiment mal isolé. Les murs sont vite noircis par les bougies qui sont alors le seul moyen pour éclairer les coursives et surtout la scène ; dans la pénombre, le public a bien du mal à voir les expressions des comédiens et la qualité des décors. De plus comme le bois et le feu ne font pas bon ménage, on a construit un château d’eau dont les clapotis incessants empêchent d’entendre correctement les dialogues. Enfin, il est impossible à l’époque, de venir à la Comédie en carrosse, car déjà, les problèmes de circulation se font ressentir sur le plateau central. Ce bâtiment ne sera jamais fini, faisant l’objet d’incessants travaux qui ne donneront jamais vraiment satisfaction. La municipalité le laissera se détériorer, avant de prendre la décision de le raser en 1883 pour le bonheur des catholiques qui n’ont jamais vu d’un bon œil, la cohabitation des messes et des représentations jugées parfois subversives. Ils pousseront un ouf de soulagement quand sera annoncé un nouveau projet de salle, proche de la place de Jaude, sur les fondations et les murs de la Halle aux toiles.
Mlle George, une « vedette » internationale
Malgré son inadaptation, ce bâtiment va remplir son office et rassembler une population diverse sur le plan sociologique et en attente de spectacles qui font « sens moral et politique ». Avec l’ouvrage 1825, George déployée ou les vedettes du théâtre parisien en tournée, Philippe Bourdin retrace un pan de la vie culturelle de Clermont, ville de 35 000 habitants à l’époque, capitale du 12e arrondissement théâtral. 1825 est la saison qui voit arriver sur la scène de la place Impériale, Mlle George, une « vedette » internationale, tragédienne de renom formée à la Comédie Française, pour 12 représentations du Mérope de Voltaire. L’auteur replace la comédienne dans l’environnement théâtral de l’époque, riche en critiques, jalousies et autres chausse-trappes. Il revient également sur cette période, entre Mlle George et Sarah Bernhardt, durant laquelle les entrepreneurs de spectacles cherchent à asseoir leur légitimité tout en expérimentant le bon dosage entre nouveautés du répertoire et présence de vedettes en capacité de garantir leur survie économique et celle de la salle.
Philippe Bourdin, l’historien spécialiste du théâtre
Philippe Bourdin est professeur d’histoire moderne à l’Université Clermont Auvergne, membre de l’Institut universitaire de France et spécialiste de l’histoire politique et culturelle de la Révolution française et de l’Empire.
Il a écrit ou dirigé une quarantaine d’ouvrages, parmi lesquels Aux origines du théâtre patriotique (CNRS Éditions, 2017) et La Comédie de Clermont-Ferrand, deux siècles de théâtre en province, de Louis XV à la troisième république est un ouvrage conséquent très documenté de 548 pages et 300 illustrations sur le théâtre à Clermont entre le milieu du XVIIe et la fin du XIXe siècle (Presses universitaires Blaise Pascal, 2022).
1825, George déployée ou les vedettes du théâtre parisien en tournée, est le troisième livre de Philippe Bourdin dans la collection Cette année là des Éditions Midi-Pyrénéennes, dirigée par Didier Foucault. il a également signé 1793, brûlez ces saints que l’on ne saurait croire et De capes et de Cros, petits meurtres entre ennemis politiques.
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