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Livre Bourdin La Comédie de Clermont-Ferrand
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Plongée dans le théâtre clermontois de Louis XV à la 3e République #1

Philippe Bourdin, professeur d’histoire moderne à l’UCA, vient de publier aux Presses Universitaires Blaise-Pascal, un livre intitulé "La Comédie de Clermont-Ferrand, deux siècles de théâtre en province, de Louis XV à la troisième république". L'ouvrage présente une histoire passionnante du théâtre clermontois tant sur la plan culturel que sociologique et politique.

Philippe Bourdin, professeur d’histoire moderne à l’Université Clermont Auvergne est membre de l’Institut universitaire de France et spécialiste de l’histoire politique et culturelle de la Révolution française et de l’Empire. Il a écrit ou dirigé une quarantaine d’ouvrages, parmi lesquels Aux origines du théâtre patriotique (CNRS Éditions, 2017). Sa dernière parution La Comédie de Clermont-Ferrand, deux siècles de théâtre en province, de Louis XV à la troisième république est un ouvrage très documenté de 584 pages et 300 illustrations sur le théâtre à Clermont entre le milieu du XVIIe et la fin du XIXe siècle. L’auteur propose une immersion de plus de deux siècles dans le théâtre s’appuyant sur des recherches approfondies tant sur le plan sociologique et politique qu’artistique.
7 Jours à Clermont propose une rencontre avec Philippe Bourdin en deux parties. #1 le contexte, #2 les différents bâtiments qui abritèrent le théâtre clermontois.

O.P : On associe aujourd’hui le nom Comédie à la Scène Nationale, mais en réalité ce nom était utilisé depuis longtemps.
P.B : Oui, on appelle Comédie au XVIIIe siècle, un grand nombre de salles municipales, en réalité soit Comédie, soit Salle de spectacle. Mon ouvrage commence sous Louis XV pour courir jusqu’en 1890, date de la construction de l’Opéra de Clermont, j’ai donc gardé ce mot car il est emblématique du Siècle des lumières et des héritages de celui-ci.

O.P : Pourquoi avoir choisi de traiter la période Louis XV-1890 ?
P.B : Cette période est presque liée aux bâtiments existant finalement. Avant 1759, il n’y a pas de théâtre en dur à Clermont, on joue, comme partout en France où il n’y a pas de salle, dans un jeu de paume qui se situe rue des Gras mais aussi depuis le XIVe dans les fossés de la ville. Ce sont surtout des troupes de baladins et de montreurs de curiosités qui sont là ; ils peuvent construire quelques petites machineries dans les fossés, d’où le choix de ces lieux. On joue aussi au collège de Clermont mais il faut attendre 1759 et l’intendance de Ballainvilliers pour que soit édifiée la première salle de théâtre à Clermont, rue Thomas.

O.P : Sur le Plateau central derrière l’actuelle Mairie ?
P.B : Oui. Très curieusement alors que l’art théâtral est beaucoup critiqué par l’Eglise, les premières salles clermontoises vont être construites dans une grande proximité de la Cathédrale.

O.P : L’Auvergne était-elle  déjà à l’époque une terre de théâtre ?
P.B :  De manières générale, la France est devenu un territoire de théâtre à partir des années 1750. 20 ans plus tard, on parle même d’une « théâtromania » qui s’est emparée des Français. C’est plus vrai dans les villes qui ont une certaine importance et donc une clientèle à demeure pour aller au théâtre. Mais les troupes ambulantes souvent familiales sont nombreuses, et parcourent le reste du territoire. La difficulté pour l’Auvergne réside bien dans les parcours et les routes. Il est difficile d’aller de Clermont vers le Cantal, mais ce circuit est emprunté par différentes troupes qui traversent la région en se plaignant systématiquement du manque à gagner, des pertes liées aux transports et du faible nombre de spectateurs.

O.P : Comment était l’ambiance dans les théâtre dans ces années là ?
P.B : Le respect et le silence que l’on connaît aujourd’hui se sont construits sur un temps assez long,  durant les XVIIIe et XIXe siècles, à grands coups d’interdits, de proclamations municipales et de règlements. En fait le lieu de théâtre est un des rares lieux de sociabilité où l’on rencontre une grande diversité sociologique. Les autres lieux sont des salons, des loges maçonniques, des académies. Pour le coup, on a là un mélange social intéressant d’autant que le théâtre est un lieu de débats. Un lieu de débat à l’intérieur de la salle avec quelquefois des bagarres, mais un lieu de débat entre la scène et la salle. L’actualité est prise à témoin et on demande aux artistes de répéter telle ou telle réplique qui fait mouche avec un fait local ou national.

O.P : Le théâtre avait-il une mission politique ?
Elle n’est pas affirmée mais elle existe et elle va durer jusque dans les années 1870 où l’on apprend par le théâtre ce que sont le début du socialisme, ce qu’est l’Utopie, ce qu’est la guerre de sécession aux Etats-Unis, ce que sont les premières conquêtes coloniales françaises… Effectivement c’est un lieu d’information alors que par ailleurs l’information se développe au XIXe avec la presse, prenant la suite des colporteurs.

O.P : De fait les troupes était surveillées ?
P.B : Durant toute le période que couvre le livre, le théâtre est marqué par la censure des pouvoirs politiques en place et parfois par des critiques virulentes de l’Eglise qui voit dans certains genres de théâtre, comme la comédie italienne, l’instrument du Diable. Cette critique est plus vraie au XVIIIe qu’au XIXe siècle. Au XIXe elle se déporte un peu. On regrette que les portes de la salle soient en face du portail sud de la Cathédrale car en sortant de la messe, on peut voir quelques personnes sortir de la salle de spectacle. Dieu et le Diable se confondent ,en quelque sorte ,Place de la Victoire…même si à l’époque elle ne s’appelait pas comme cela.

Livre "La Comédie de Clermont-Ferrand" Philippe BourdinLa Comédie de Clermont-Ferrand, deux siècles de théâtre en province, de Louis XV à la troisième république
par Philippe Bourdin, aux Presses Universitaires Blaise-Pascal, hors collection.
584 pages et 300 illustrations, format 21×27 cm.

 

À propos de l'auteur

Olivier Perrot

Pionnier de la Radio Libre en 1981, Olivier Perrot a été animateur et journaliste notamment sur le réseau Europe 2 avant de devenir responsable communication et événements à la Fnac. Président de Kanti sas, spécialisée dans la communication culturelle, il a décidé de se réinvestir dans l'univers des médias en participant à la création de 7jours à Clermont.

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