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Louis Rosier "Au volant de sa Talbot Lago Record en 1951" / Photo Jean Dieuzaide
Louis Rosier "Au volant de sa Talbot Lago Record en 1951" / Photo Jean Dieuzaide
Patrimoine Sports

Circuit de Charade : la première course

La première course automobile disputée à Charade s’est déroulée il y a 65 ans, précisément, le dimanche 27 juillet 1958, marquant le début de l’âge d’or du circuit auvergnat.

En ce beau et chaud dimanche de l’été 58, il y a foule autour du puy de Gravenoire. Une bonne partie du gratin du sport automobile, les « officiels » et un public fourni,  sont rassemblés pour la toute première course disputée sur celui que l’on n’appelait pas encore Circuit de Charade mais Circuit Automobile de Montagne d’Auvergne. Jean Auchatraire président de l’ASACA, Association Sportive de l’Automobile Club d’Auvergne est naturellement présent mais pas celui avec qui il a longuement travaillé pour que naisse ce circuit, l’Auvergnat de Chapdes-Beaufort, Louis Rosier. Ce grand pilote-constructeur qui fit briller le bleu des Talbot-Lago et le rouge des sportives de Maranello et de Modène a perdu la vie un an et demi plus tôt lors d’une course disputée sur l’autodrome de Linas-Montlhéry. L’idée de l’emplacement du circuit leur était venue après la catastrophe du Mans en 1955 qui avait rendu caduc un premier projet plus urbain, à l’est de Clermont. Le coup de génie de ce duo fut de composer avec la topologie des lieux  et d’imaginer un circuit avec des montées, des descentes et forcément de nombreux virages. Pour pallier l’absence de Louis Rosier lors de ce premier rendez-vous de sport auto, son portrait en grand format est accroché à la roche, au dessus du dernier virage avant la ligne droite des stands. Ce virage s’appelle toujours « le Rosier ».

La revanche de la légèreté sur la puissance

La première course disputée sur le circuit est une course d’endurance de 3 heures réservée aux voitures de type Grand Tourisme. Sur les 58 engagées, seuls 45 participent aux essais et 40 à la course*. Le circuit est une découverte pour tous les pilotes qui ne tardent pas à comprendre qu’ils ont affaire à un « circuit d’homme ». 8,055 KM, 51 courbes, près de 180 mètres de dénivelé, de quoi mettre à rude épreuve moteurs, freins, et pneus. Rangées en épi pour un départ façon Le Mans, les premières places sont trustées par une armada de Ferrari 250 GT, au milieu desquelles se sont infiltrées des Lotus Eleven. Plus loin sur la grille, les Alfa, Alpine, Panhard, Bristol et Triumph composent le reste du plateau reparti en classe de cylindrées. Le truculent et ventripotent Raymond « Toto » Roche, directeur du circuit de Reims-Gueux et conseiller auprès du duo Rosier/Auchatraire sur le projet Charade, tient le rôle de directeur de course. A 14h00 précises, il donne le départ, et c’est la Ferrari pilotée par le belge Olivier Gendebien qui prend la tête, suivie par les autres voitures arborant l’emblème au cheval cabré. Très rapidement le tracé va se révéler difficile pour les voitures italiennes qui dépassent la tonne. Leur  puissant V12 de 3 litres (270 cv environ) ne comblera pas le handicap du poids. Une auto légère est plus facile à emmener dans les 51 virages et c’est la Lotus Eleven de 450 kg  au fiable moteur Coventry Climax (1100 cc pour 80 CV) qui permet à Innes Ireland pilote britannique de 27 ans de s’emparer de la tête de la course au 13e tour. Il ne la lâche pas jusqu’au drapeau à damier.

Le début de l’âge d’or

Pour revivre l’ambiance de cette première course quoi de mieux que de visionner le film de 16 minutes de Roger Benech. La course y est racontée en détail et l’on se plaît à retrouver un circuit flambant neuf aux talus terreux sur lesquels la nature n’a pas encore repris ses droits. Il est également très représentatif des conditions de courses de l’époque, une époque durant laquelle le mot héros a encore tout son sens. Les pilotes sont des gentlemen-drivers qui allument des cigarettes et embrassent leurs compagnes dès le contact coupé. Certains s’engagent même dans plusieurs courses le même jour, à l’image de Maurice Trintignant qui terminant 2e au général de cette course de 3 heures saute dans sa monoplace Formule 2 pour la course suivante et la gagne.

Mur de Manson / Photo J.P.B
Le mur de Manson récemment restauré

Durant une quinzaine d’années le circuit de Charade va vivre son âge d’or. Le GP de France auto de 1972 et le GP de France moto de 1974 marquant une sorte d’apothéose dans les deux disciplines. Et puis peu à peu « le plus beau circuit du monde » comme l’avait baptisé Stirling Moss en 1959 a été délaissé,  jugé inapte à recevoir des courses modernes. Un nouveau tracé de 3km975 est créé en 1988, il ne passe plus dans la spectaculaire cuvette de Gravenoire. C’est l’outrage ultime pour les amateurs de ce circuit unique. Ils ne s’en remettront jamais.

-La bible : Charade, le plus beau circuit du monde 1958/2002  par Patrick Besqueut, éditions du Palmier.
-Le film de Roger Benech :

* Source : Charade, le plus beau circuit du monde / P. Besqueut

À propos de l'auteur

Olivier Perrot

Pionnier de la Radio Libre en 1981, Olivier Perrot a été animateur et journaliste notamment sur le réseau Europe 2 avant de devenir responsable communication et événements à la Fnac. Président de Kanti sas, spécialisée dans la communication culturelle, il a décidé de se réinvestir dans l'univers des médias en participant à la création de 7jours à Clermont.

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