En 2017, la fin de quotas sucriers a sonné comme un arrêt de mort pour la sucrerie de Bourdon. Avec une chute des prix de 40% et des problèmes de production liés au réchauffement climatique, l’avenir était plus que sombre pour l’entreprise historique installée sur la commune de Clermont, à la limite d’Aulnat. Son propriétaire, le groupe Cristal-Union a préféré jeter l’éponge fin 2019 et a mis en place un PSE, Plan de Sauvegarde de l’Emploi pour accompagner les 80 salariés du site*. 3 projets de reprises, dont un sous forme de SCOP, ont vu le jour mais, même avec des coût fixes réduits et de la bonne volonté, les difficultés restaient insurmontables sur un bassin de production finalement assez réduit de 5000 hectares en comparaison d’autres bassins français gigantesques et donc plus rentables. A ce jour Cristal-Union, par le biais de son directeur de l’ordonnancement industriel Benoît Pernod, annonce 95% du personnel reclassé. Grâce à une enveloppe conséquente de 250 000 euros consacrée à la formation, 70% des anciens salariés ont retrouvé une activité, 17% sont en retraite ou pré-retraite, 5 d’entre-eux ont accepté la mobilité interne et enfin 3 sont restés sur place pour travailler sur le projet de revitalisation.
Revitalisation du site et 200 emplois
Pour Cristal-Union, entreprise soucieuse de sa responsabilité sociale et environnementale, il n’était pas question de laisser les lieux en friche. En partenariat avec les institutions locales et régionales, elle a souhaité la revitalisation du site en vendant le foncier et les bâtiments qui peuvent être requalifiés. 15 porteurs de projets ont déposé des dossiers qui devaient répondre à 6 critères imposés : planning, volume d’emplois, impact de l’activité sur le voisinage, valorisation de l’espace, sérieux général du dossier et respect du patrimoine immobilier. Au final, 7 projets ont été retenus dans les domaines de la manufacture, la maintenance mécanique, le commerce, le stockage et l’univers agricole. Ces activités concentrent 200 emplois, la moitié étant des relocalisations, l’autre moitié des créations. Cristal-Union a tout mis en oeuvre pour que les activités débutent fin 2023 au plus tard.
Une partie des bâtiments conservés
C’est en 1856, que le Duc Charles de Morny, bâtard royal et demi-frère de l’empereur Napoléon III, quitte la vie militaire, blessé et malade. Il se lance alors dans la fabrication de sucre de betterave en rachetant la sucrerie installée à côté du Château de Bosredon, bâtisse construite dans les années 1820/1830. Bosredon deviendra par le suite Bourdon.
C’est dans une des pièces jadis occupée par le Duc** que travaille aujourd’hui Benoît Pernod. En tant que directeur de l’ordonnancement industriel de Cristal-Union, ce passionné d’histoire est chargé du réaménagement du site. « Le bâtiment principal datant du XIXe va disparaître. Avec de multiples transformations qui l’on dénaturé et des murs porteurs trop nombreux, on ne peut pas le requalifier » explique-t-il. « Par contre, le Château du Duc, le Silo à la forme particulière marquant une époque, les ateliers qui abritèrent une distillerie et le hall d’expédition sont conservés. Sur 5 hectares construits, 2 subsisteront ». Respectueux du passé et sensible au devoir de mémoire Benoît Pernod a géré les archives qu’il a trouvées sur le site.
J’ai retrouvé les archives depuis 1837 et aussi des photos datant de la première guerre mondiale sur lesquelles on peut voir, installés dans la sucrerie, des simulateurs de vol en bois qui servaient à l’entrainement des pilotes basés sur l’aéroport d’Aulnat. J’ai aussi retrouvé des éléments du « stand » que la sucrerie avait pris sur l’exposition universelle de 1900. C’est passionnant de retrouver ces éléments du passé » Tout ce matériel a été légué au Musée Lecoq et aux archives du Puy-de-Dôme pour alimenter le fonds départemental.
*Le PSE concerne également les sites de Toury au Nord d’Orléans et de Strasbourg de manière partielle.
**Charles de Morny est à l’origine de la fondation du village du Vésinet, de l’urbanisation de Deauville et du Parc des Princes à Boulogne. Il fut président du conseil général du Puy-de-Dôme de 1852 à 1865.
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