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Le touriste est une vache à lait, c’est bien connu ! / © A.-S. Simonet
Chroniques

Un peu, « bon goût », passionnément…

Des chapelets de Vierges lourdaises délicatement bleutées et nuitamment phosphorescentes. Un bâton de berger un peu plus sec que le saucisson d’un certain Justin B. mais pas assez endurant pour affronter le GR20*. À ce propos insulaire, un brin d’humour ajaccien servi sur sets de table coréens plastifiés : « Un Corse rentre chez lui après une journée de travail. Visiblement exténué, il dit à sa femme : “Le patron nous a fait travailler comme quatre. Heureusement qu’on est dix !”»

Voici des ersatz de santons aux yeux bridés visiblement pas « Ravis » de crécher sur une étagère en mécréante compagnie d’un hibou rouge vif en plâtre, les yeux hagards devant tant de malheur ! Dans les parages, un improbable chien marronnasse, affublé d’un collier en strass et d’oreilles de fennec, secoue sa gueule de suricate en faisant la conversation à une grenouille d’un traumatisant vert granny. Des séries non limitées de boules à neige tellement inénarrables que seul un silence pudique peut donner une ampleur de la floconneuse catastrophe. Les boules ! Des monticules informes de magnets à prétention fromagère auvergnate.

Saint Bernard, priez pour nous !   

Cette aire de repos sur l’autoroute Clermont-Paris n’hésite pas à condamner ses visiteurs à la peine « capitale ». / © A.-S. Simonet

Des vases sans doute décorés par décalcomanie à rendre neurasthénique le moins orgueilleux des lys. Des porte-monnaie qui sentent plus l’arnaque que le cuir. Un gardian camarguais pacsé avec un séduisant flamant rose. Un puy de Dôme aux allures de Fuji-Yama qui crache des fourchettes à escargots. Des pipes bien davantage de pacotille que de Saint-Claude. Le crayon de papier d’Alice au pays des merveilles, dont le diamètre et la taille empêchent toute prise en main à moins de l’offrir à King-Kong !

De la vaisselle en « porcelaine » de nulle part, garnies d’un « Auvergnat » qui fait chabrot sans le savoir. Des assortiments de tortues qui portent tout le poids du monde sur leur dos. Des dés à en découdre rien qu’en les regardant ! L’orchestre symphonique des « cigales radars » des Baux-de-Provence en stridulations « made in China » ! Quant au chalet suisse aux volets orange, dans une échoppe d’Argelès-sur-Mer il cohabite avec un chatoyant ara tropical et un dauphin bleu clair, rigolard de voir passer tant de bourrelets écarlates ! Le bon gros saint-bernard d’avalanches avec son légendaire tonnelet sans eau-de-vie ; on voudra bien lui pardonner de tirer une langue de caniche nain sous le cagnard poussiéreux du Grau-du-Roi !

Pouzzolane en tête de gondole

Également labellisés sauveteurs, voici nos amis les pompiers, juchés sur une pouzzolane, un bébé emmailloté lové dans leurs bras virils en plastoc pur. Pauvre gosse !… Fut-il vaillamment extirpé d’une tour infernale ? Revient-il miraculeusement des entrailles de la Terre tremblante ? Personne ne le saura jamais. Non loin de là, sûrement arrivés en renfort, d’autres soldats du feu brandissent une hache de bûcherons canadiens, semblant attendre pour frapper le coup de sifflet de l’arbitre. Décidément accueillante, la pouzzolane joue sans complexe le rôle de tapis d’herbe grasse pour une vache blanche et noire nantie, en guise de cloche, d’un maigrelet bout de ficelle supportant l’étiquette de son prix, beaucoup moins modeste ! En cas de pénurie de bovidés, pas de problème, un dromadaire famélique à pelage et frimousse d’écureuil portant barbichette fait l’affaire ; tant pis s’il n’a visiblement pas la bosse du désert ! Mention spéciale pour le chamois, le regard éteint tourné vers l’entrée de la boutique et les alpages de sa profonde mélancolie.

La palme, elle, revient ex æquo aux cartes postales dites « de vacances », ce qui ne saurait excuser leur consternante vulgarité, et à la manie d’inscrire partout Souvenir de, au cas où pareil « cadeau » n’existerait nulle part ailleurs !…

Adaptation très libre de la devise des pompiers, Courage et dévouement. / © A.-S. Simonet

* Ce chemin de grande randonnée, qui parcourt l’Île de Beauté, porte le numéro minéralogique du département que fut la Corse jusqu’en 1976.

 

À propos de l'auteur

Anne-Sophie Simonet

Historienne de formation universitaire, Anne-Sophie Simonet arpente depuis des décennies le « petit monde » clermontois de la presse. Auteur d'une dizaine d'ouvrages, c'est en tant que président de l'association Les Amis du vieux Clermont qu'elle invite à cheminer dans sa ville natale, la plume en bandoulière.

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