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Samantha Smith / Photo DR Wikipédia
Samantha Smith / Photo DR Wikipédia
Edito

Samantha Smith : le destin extraordinaire d’une petite fille de onze ans

Il y a quarante ans, au temps de la "Guerre froide", Samantha Smith, une jeune Américaine, écrivait au chef de l’Etat de la puissante Union Soviétique. Et l’invraisemblable se produisait…

C’est presque par hasard que je suis « tombé » sur cette histoire, au détour d’un zapping télévisuel lors d’une soirée fiévreuse ( virus pré-hivernal). Un écran pub sur la chaîne que j’avais prévue de regarder et me voilà embarqué sur une autre piste : Canal Docs, en l’occurrence. Le visage d’une adorable petite fille a suffi à me sortir, pour un temps, de ma somnolence grippale. Les événements bien réels me revenaient vaguement en mémoire…

Une bouteille à la mer

Ils datent du début des années 80, époque de tension entre les deux superpuissances, Etats-Unis et URSS, sur fond d’élection de Ronald Reagan à la Maison Blanche et de déploiement de missiles américains dans certains pays de l’Europe occidentale. On évoque alors une possible « guerre des étoiles » .

Une écolière de onze ans, effrayée par cette hypothèse cataclysmique, prend sa plume et, depuis sa petite ville de Manchester dans le Maine, rédige une lettre destinée au premier secrétaire du Parti Communiste d’Union Soviétique, Iouri Andropov, l’ancien chef du redoutable KGB. Comme on enverrait une bouteille à la mer… « Je me suis inquiétée à propos d’une guerre nucléaire entre la Russie et les États-Unis. Est-ce que vous allez voter pour avoir une guerre ou pas ? Si vous ne le voulez pas, dites-moi s’il vous plaît comment vous allez faire pour qu’il n’y ait pas de guerre » écrit-elle au dirigeant de l’URSS. Et de conclure ainsi son courrier. « Dieu a fait le monde pour que nous y vivions ensemble dans la paix, pas pour nous combattre. »

Sur l’enveloppe, elle inscrit simplement M. Iouri Andropov- Le Kremlin- Moscou- Union Soviétique.

Le voyage au pays des Soviets

L’improbable se produit alors… Six mois plus tard, en effet et contre toute attente raisonnable, Samantha reçoit une longue réponse émanant du chef de l’Etat communiste… « Nous voulons la paix » lui assure-t-il. « Je t’invite, si tes parents sont d’accord, à venir dans notre pays, l’été étant la meilleure saison. Tu découvriras notre pays, tu rencontreras des jeunes gens de ton âge en visitant un village international pour enfants, Artek au bord de la mer- et tu constateras par toi-même : en Union Soviétique chacun est pour la paix et l’amitié entre les peuples… » L’opération n’est évidemment pas dénuée de considérations politiques. Pourtant, en juillet 1983, le séjour de la petite américaine- et de ses parents- déclenche un engouement considérable. Dans l’ex (et future) Russie, l’invitée rassemble des foules, connaît une immensément popularité, se fait des amies. Elle devient ainsi des deux côtés de l’Atlantique et un peu partout sur la planète, la meilleure et la plus inattendue des ambassadrices pour la paix. Qu’importe, au fond, l’entreprise de propagande orchestrée par le Kremlin et le scepticisme lucide de certains responsables Américains.

Le dernier vol

Le conte de fée va pourtant virer au tragique : après son retour aux Etats-Unis, le soufflé est loin de retomber. L’existence de Samantha s’emballe : elle écrit un livre (« Journey to the Soviet Union »), effectue un voyage au Japon, participe à des émissions télé, tourne une série. Un destin trop grand pour une petite fille ? Il s’interrompt brutalement lorsque l’avion qui la ramène d’un tournage, en compagnie de son père, s’écrase à quelques kilomètres de chez elle. Samantha Smith meurt à treize ans.

Quatre mois après l’enterrement de l’adolescente fille dans l’église d’Augusta (Maine), Mikhaïl Gorbatchev, successeur d’Andropov lui-même décédé en 84 , et Ronald Reagan se serreront la main, le premier pas vers la désescalade. L’histoire extraordinaire, tragique et ô combien émouvante de Samantha Smith m’a fait songer à la chanson « Russians » de Sting, composée en 1985. Elle s’achevait par ces paroles : « We share the same biology, regardless of ideology/ But what might save us, me and you/ Is if the russians love their children too. »

À propos de l'auteur

Marc François

A débuté le métier de journaliste parallèlement sur une radio libre et en presse écrite dans les années 80. Correspondant de plusieurs médias nationaux, rédacteur en chef de l’hebdomadaire Info Magazine (Clermont, Limoges, Allier) pendant 9 ans, il a présidé le Club de la Presse Clermont-Auvergne entre 2009 et 2013. Il est l’initiateur de 7 Jours à Clermont.

1 Commentaire

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  • Merci mon cher Marc pour ce papier qui fait chaud au cœur dans cette actualité anxiogène qui compose notre quotidien.
    Continue de nous envoûter par des informations positives telle que l’histoire originale de cette petit-fille .
    Je te lis régulièrement et t’invite à rester longtemps encore passionné comme tu l’es
    Amicalement
    Luc ANDOUARD

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