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Kayako Kimura au stade Michelin- photo Yves Meunier.
Chroniques

Kayako derrière le masque

Dans le monde d’avant, il n’était déjà pas simple à un journaliste d’extraire de sa bulle une figure du sport professionnel afin de converser librement devant un verre de bière ou une citronnade. Dans notre monde d’après, le virus affecte non seulement le goût et l’odorat, mais aussi le toucher. Des cinq sens il n’en reste plus que deux à disposition: la vue et l’ouïe. Kayako s’en contente, poursuivant ses lièvres à travers l’hexagone.
Kayako en salle de presse- photo Y.Meunier.

En provenance d’Arles où elle réside, Kayako Kimura est comme souvent l’une des premières à pousser la porte de la salle de presse du stade Michelin. A Clermont, nul jusqu’alors n’a vu son vrai visage, seulement deviné derrière le masque.

Les (grands) pas de la Japonaise

« Ce soir, j’avais Nîmes-Marseille en ligue 1 à une demi-heure de chez moi ou Clermont-Montpellier en Top14….mon agence a choisi ! » Avec en prime cinq heures et demie de TER (onze heures aller-retour) pour une énième traversée du Massif central, ce sera donc Kotaro Matsushima plutôt que Hiroki Sakai. L’arrière de l’ASM et le latéral de l’OM faisant partie des cibles favorites de cette native de Tokyo.

Démasquée- photo Le Républicain Lorrain.

Pratiquant le tennis mais littéraire dans sa tête elle avait trouvé un compromis dès sa sortie de l’université en se lançant dans l’aventure du journalisme sportif. Tennis au menu pour commencer avant d’être nommée par son groupe de presse correspondante à Sidney où la couverture de nombreux sports lui ouvrira une fenêtre sur le football.

L’exode vers l’Europe des internationaux japonais allait bientôt inciter Kayako à franchir un autre grand pas, de l’Australie vers la France. Ni trop loin du TGV ni trop loin de l’OM où évoluait le latéral Koji Nakata, c’est dans la ville d’Arles qu’elle et son mari franco-australien posaient leurs valises en 2005.

Le TGV, c’était pour aller suivre de près les exploits du buteur manceau Daisuke Matsui ou ceux de Masashi Oguro qui opérait alors à Grenoble.

En attendant l’ovale

La mission confiée à Kayako par plusieurs magazines sportifs était de relater les faits et gestes des sportifs japonais, en particulier les footballeurs.

Hiroki Sakai- photo francetvinfo.

C’est ainsi que de fil en aiguille l’Arlésienne s’est installée dans le paysage du ballon rond pour devenir en 2008 correspondante de Kyodo News, principale agence de presse du Japon.

Si la matière football ne manque pas (la quasi-totalité de l’équipe nationale du Japon joue actuellement dans les grands clubs européens), le rugby est entré dans le viseur de Kayako en 2016 avec l’arrivée à Toulon du n°15 Goromaru. L’évènement tournant au bide pour le héros du Mondial 2015 avec cinq malheureuses feuilles de match et un retour express au Pays du soleil levant.

Tout en gardant un œil sur les phocéens Sakai et Nagatomo et l’ex gardien du FC Metz Kawashima passé à Strasbourg, l’autre œil de la japonaise est donc aujourd’hui focalisé sur Kotaro Matsushima, révélation du Mondial 2019, émigré à l’ASM-Clermont entre deux épisodes de confinement.

Tout, tout, tout…

Tout sur Kotaro- photo Kyodo News.

…vous saurez tout sur Kotaro !

Voilà ce qui est promis aux fans japonais, sauf que la tâche de la correspondante de Kyodo News n’est pas rendu aisée par la chape sanitaire qui pèse sur le travail de la presse. « Sakai en est à sa cinquième saison à l’OM, je le connais bien d’avant le Covid et je peux échanger directement par téléphone. Il est très disponible et ne rechigne jamais ». (ndlr : Il est même apprécié par les supporters Olympiens…c’est tout dire !). « En revanche, je n’ai jamais pu rencontrer Nagatomo qui vient d’arriver. Alors j’envoie mes questions à l’attaché de presse de l’OM et…c’est un peu compliqué ! » (On devine une grimace sous le masque).

A Clermont, ce n’est pas vraiment simple non plus. Kayako Kimura n’a eu l’occasion de côtoyer Matsushima qu’une seule fois depuis son arrivée, lors d’un entrainement d’avant saison.

Business obligeant, le club communique beaucoup sur l’image de son n°15, notamment en langue japonaise à travers ses plateformes numériques et les réseaux sociaux. Même si l’intéressé donne plutôt dans le genre « discret-timide ne cherchant pas trop le contact » nous confirme Kayako.

Rencontres du troisième type

Mis à part un passage de la star des ‘’Brave Blossoms’’ (1) en salle de presse du Michelin, la bulle-covid ne favorise guère une convivialité reléguée il est vrai depuis longtemps au rayon des souvenirs. Au-delà des rendez-vous que l’ASM organise sur Zoom avec les médias japonais une fois par mois, les échanges entre Kotaro et Kayako passent par les arcanes de WhatsApp via Vincent, l’attaché de presse du club. C’est comme ça après chaque match, y compris à l’extérieur où l’Arlésienne ne rate pas une apparition lorsque les ‘’jaune et bleu’’ sont de sortie.

Interview virtuelle- photo Y.Meunier.

En tribune de presse, elle jongle entre l’ordinateur et un cahier sur lequel sont notées et mises en images les situations de jeu où Matsushima se trouve  impliqué. Car au Japon, ils veulent tous les détails !

Petite, au pays des Manga, Kayako s’exerçait à la peinture, fascinée par Van Gogh.

Le hasard n’est donc pas si grand qu’elle eut choisi Arles au moment de s’installer en France. Sur les rives du Rhône, autour des arènes, l’homme à l’oreille coupée a couché sur la toile (la vraie) près de 300 œuvres.

Parmi elles ‘’Terrasse de café le soir’’ « avec un ciel de nuit étoilée, sans noir, rien qu’avec du beau bleu, du violet et du vert….un de mes tableaux préférés !» commente la Dame de Kyodo News qui, entre deux matchs de foot ou de rugby et une prochaine visite à Clermont, se plonge, en japonais dans le texte, dans la lecture de Duras, Céline ou Camus « …et aussi Genet, depuis ma jeunesse ! » Installée peut-être place du forum, à la terrasse du Café Van Gogh.…dès qu’il aura pu rouvrir ses volets !

Dans la vie, il n’y a quand-même pas que le foot et le rugby.

(1)  Nom de l’équipe nationale du Japon évoquant ‘’les fleurs de cerisier’’

Terrasse de café le soir- Vincent Van Gogh / Musée Kröller-Müller à Otterlo.

 

À propos de l'auteur

Yves Meunier

Bourbonnais originaire de Gannat où il s’est essayé au rugby sous le maillot de l’ASG pendant une douzaine d’années. Diplômé d’Etudes Supérieures en Sciences Economiques à l’Université de Clermont. Journaliste à France3 Région de 1972 à 2007. Aujourd’hui impliqué avec des amis dans une aventure viticole du côté de Saint-Emilion et toujours en prise avec le sport auvergnat au sein de l’Union des Journalistes de Sports en France.

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