L’Exposition de musique de télévision de l’artiste sud-coréen Nam June Paik, est considérée, par les historiens de l’art, comme étant l’acte fondateur de l’Art vidéo (lire notre article Vidéoformes, festival crossover). C’était en 1963, il y a tout juste 60 ans. « A l’époque, l’art vidéo est entré dans le mouvement bien plus large qu’est le mouvement dadaïste Fluxus, né juste après-guerre, époque durant laquelle les gens avaient besoin de démontrer la folie humaine en faisant des œuvres un peu iconoclastes, un peu décalées, outrageuses parfois » explique Gabriel Soucheyre, fondateur et directeur du festival Vidéoformes. « 22 ans après l’exposition de Nam June Paik, naissait notre festival. Son objectif n’a pas beaucoup varié : rendre compte de toute la création émergente liée à une technologie. Il y a eu la TV puis beaucoup plus tard l’ordinateur, l’Internet et aujourd’hui, l’intelligence artificielle et autres avatars comme les NFT, les réalités virtuelles ou augmentées. Notre mission est d’observer, choisir, montrer et partager avec le public des choses pertinentes et de témoigner de la création actuelle ».
Festival protéiforme
Comme chaque année, le 38e festival propose des rencontres ouvertes à tous, avec des professionnels et des artistes sur certaines thématiques mais aussi des débats entre artistes et spécialistes. Comme pour le Festival du court métrage ou Traces de vie des projections sont accompagnées d’une compétition assez serrée en raison du caractère innovant de ce qui est présenté. Deux jury, un professionnel et un universitaire avec des étudiants, travaillent de concert, pour décerner trois prix. Une partie connecté au spectacle vivant est destinée à montrer comment les artistes peuvent s’exprimer différemment avec les technologie numérique du moment, enfin la partie la plus populaire, les installations sur un temps plus long. « Cette année, ce qui est présenté permettra de sortir de l’environnement un peu toxique de guerre de pandémie et autre. On pourra retrouver des anges ou entrer dans l’univers des jeux vidéo avec des artistes qui les détournent en les étudiants d’une manière fine et intelligente » précise Gabriel Soucheyre.
Un regard sur notre vie
« La technologie a toujours existé. Dans les grottes de Lascaux, le geste de l’homme qui a pris de la poussière dans sa main pour la souffler sur son autre main afin créer une ombre chinoise était déjà une technologie » précise le directeur de Vidéoformes. « L’art a toujours été lié à une technologie. Cela devient intéressant lorsque les artistes détournent cette technologie ou s’en servent pour leurs propres fantasmes ou leurs propres histoires. Ce n’est pas si difficile que cela à appréhender. On s’en rend compte quand on travaille avec les jeunes publics dans les établissements scolaires. Forcement ce n’est pas pour tous les publics mais ce n’est pas du tout fermé » Si le public des années 60/70 avait du mal à comprendre comment on pouvait faire de l’art avec un objets « sacré » comme un téléviseur, le public actuel le comprend plus facilement du fait d’une vie rythmée par la numérique. « Ce public est celui des digital natives, les natifs numériques, ceux qui ont un pouce surdimensionné parce qu’ils tapent sur leurs smartphones. Cette année, un des films en sélection pose même la question du passage de l’image horizontale à l’image verticale parce que TikTok impose ce modèle ». Mais un festival comme Vidéoformes est un moment d’observation de la société « Les œuvres présentées durant le festival portent un regard sur notre vie, sur la déshumanisation, sur le dérèglement climatique, les rapports humains, les transgenres. Comme on travaille avec des gens qui sont souvent à l’avant-garde des formes, ils le sont aussi sur les thématiques ». conclut Gabriel Soucheyre.
Vidéoformes 2023 : 38e Festival International d’Arts Hybrides et Numériques du 16 Mars au 2 Avril à Clermont : cliquez ICI pour retrouver le programme complet
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