2024 est une année doublement symbolique pour le Festival Bach en Combrailles. En effet l’association organisatrice célèbre, dans quelques jours, sa 25e édition et les 20 ans de l’orgue de Pontaumur. Passer le quart de siècle pour une manifestation culturelle est le signe de sa pertinence et de la clairvoyance de ses fondateurs. Pourtant en 1998, lorsque Jean-Marc Thiallier, vétérinaire en milieu rural, lance la première édition du festival avec pour objectif annoncé de construire un orgue à tuyaux dans l’église de Pontaumur, le petit monde local de la musique classique s’est mis à glousser. « Un festival classique dans les Combrailles, cela ne marchera jamais ! » disaient les uns quand d’autres doutaient de la capacité de l’association à mener à bien un projet aussi ambitieux que la construction d’une réplique de l’orgue d’Arnstadt, le premier dont Bach fut titulaire, dans l’église d’une commune « hors attraction des villes ».
Ce petit bout de Puy-de-Dôme qui ressemble à la Thuringe
Aujourd’hui, alors que Jean-Marc Thiallier est parti parler des Messes, Passions et autres Variations avec les anges, son fils Antoine, pas encore trentenaire, a repris le flambeau avec la même exigence que son père. « Ces deux étapes sont symboliques. Deux moments importants, 25 ans… moi j’en ai 29, cela montre la longévité du festival et puis les 20 ans de l’orgue qui a été relevé l’année dernière… un moment à fêter, cela fait deux gâteaux d’anniversaire à manger et aussi voir pour demain ». Antoine Thiallier aime à rappeler que le festival a été imaginé pour faire découvrir Bach aux habitants des Combrailles, amener la musique sur le territoire, mais aussi faire découvrir les Combrailles aux passionnés de Bach « L’idée est de faire découvrir tout ce patrimoine que ce soit l’orgue, les églises, les lieux que l’on investit. Ce petit bout de Puy-de-Dôme, magnifique, ressemble selon les spécialistes à la Thuringe. Ce double enjeu est important pour nous » Des idées, le président et son équipe n’en manquent pas. « Avec le relevage de l’orgue, il est peut-être temps de l’enregistrer et de le mettre sur CD, on réfléchit à des événements sur l’année au delà du festival, à des concerts, à des résidences, à des actions pédagogiques avec l’orgue que l’on fait déjà visiter toute l’année. Effectivement des idées, on en manque pas, il y aura le temps de les mettre sur le papier concrètement, il y a plein de choses à faire ».
Profondément ancré dans le territoire avec de l’exigence
Directeur artistique du festival depuis 2016, Vincent Morel assume son rôle « Pour moi, c’est toujours une grosse responsabilité pour chaque édition, mais cette année, on doit se dire que l’on a la responsabilité d’emmener le festival dans un nouveau quart de siècle… Malgré nous, mais aussi grâce à nous, le festival est devenu un lieu de passage pour la vie musicale française et j’aime bien l’idée que cela se passe dans un territoire rural. On peut montrer que la ruralité c’est aussi cela. Le festival peut être extrêmement exigeant et rayonner de manière nationale et internationale en le faisant là où on le fait ». Vincent Morel à programmé en ouverture du festival un récital anniversaire pour les 20 ans de l’orgue avec Jörg Reddin organiste et cantor de la Bach-Kirche d’Arnsatdt et pour la clôture, une cantate pour orgue, commandée à Bernard Foccroulle qui sera donnée en création mondiale par Le Banquet Céleste et Nicolas Bucher. « Ces deux concerts ont du sens et je pense qu’un festival doit avoir du sens là où il se développe. J’aime bien faire un festival qui soit indélocalisable, que ce que l’on fait à Bach en Combrailles ne puisse pas être fait ailleurs. Inviter l’actuel organiste titulaire d’Arnstadt, qui est le successeur de Bach, pour jouer sur la copie unique au monde, ici dans les Combrailles, cela a du sens. Créer une cantate comme on va le faire, en écho à la première cantate que l’on a créée il y a 5 ans, cela a du sens et ne peut se faire qu’à Pontaumur parce qu’il y a cet orgue. Je crois que dans la culture on a besoin de sens et un lien profond avec le territoire ».
Bach en Combrailles a une place à jouer
« Cette année on aura des artistes accomplis et des tout-jeunes qui sortent des conservatoires internationaux » explique Vincent Morel. « On a tenu à mettre l’accent sur cette jeune génération qui vit des moments difficiles et qui a besoin de notre visibilité. Notre engagement est aussi auprès des artistes et en plus, quand ils ont des programmes qui rentrent en écho avec ce que l’on fait, cela apporte beaucoup plus de sens. On évolue dans le spectacle vivant et par définition ce qui est figé c’est la connaissance musicologique… pas l’interprétation qui évolue. C’est ça l’enjeu principal et nous avons une place à jouer puisqu’on est les seuls en France et au delà, à pouvoir faire des cantates avec le grand orgue de Pontaumur comme cela se faisait à l’époque. Cependant on ne se place pas comme des conservateurs du patrimoine ».
Du côté de la fréquentation, le directeur artistique constate la représentation du public puydomoîs s’est renforcé. « Entre 2016 et 2023 on est passé de 36 à 49% du public qui vient du Puy-de-Dôme, alors que la moyenne nationale est plutôt autour de 32/33% de festivaliers qui viennent du territoire. Cela montre que le festival est particulièrement proche de son public comme à l’origine. On s’adresse vraiment à la population locale et nous sommes fiers de pouvoir être extrêmement local mais aussi extrêmement exigeants en ayant un rayonnement international. »
XXVe édition du festival Bach en Combrailles, du 5 au 10 août 2024, Pontaumur et autres lieux. Programme complet et réservations en ligne sur le site web de la manifestation.
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