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Edito

L’humour convenable

Peut-on rire de tout ? Et si ça n'est pas le cas, sur quels sujets est-il permis de plaisanter? Il serait intéressant de connaître la position du quotidien "Le Monde" sur ce sujet.

L’uniformité sied à l’époque actuelle qui est celle d’une culture unique, filtrée et mondialisée. Tout écart de propos ou de conduite à cette « pensée unique » très moralisatrice vaut à son auteur d’être voué aux gémonies, interdit d’antenne ou amené devant les tribunaux. La nuance n’est plus à l’ordre du jour, l’explication se révèle inutile et il est permis de débattre sauf à se révéler d’un avis contraire. L’humour est ordonné, il doit être acceptable, correspondre à l’air du temps, sans quoi les censeurs se déchaînent et les réseaux sociaux se couvrent d’invectives. Le quotidien Le Monde, jadis grand défenseur des libertés, désavoue ainsi l’un de ses caricaturistes, Xavier Gorce, pour avoir plaisanté sur un sujet jugé inconvenable. Et de présenter immédiatement ses excuses « aux lectrices et lecteurs qui ont pu être choqués ». Il y a ainsi désormais des vaches sacrées auxquels on ne touche plus. Coluche doit se retourner dans sa tombe et il n’est pas le seul.

Vaches sacrées

Il serait fort instructif qu’un vénérable journal comme Le Monde nous éclaire sur son sens de l’humour et sur les frontières qu’il s’agit, selon lui, de ne plus franchir. En somme qu’il dresse la liste des thèmes abordables : on peut rire de ceci, mais pas de cela… La position du média, souvent considéré comme une référence, est d’autant plus fâcheuse, en réalité, qu’elle survient six ans après les assassinats de Charlie Hebdo.

« La liberté ne se négocie pas »

Ce récent épisode peut paraître anecdotique, surtout dans la période que nous traversons. En réalité, il est révélateur des limites de plus en plus restreintes de la liberté d’expression, d’une société où il ne fait pas bon cheminer hors des sentiers battus lorsque l’itinéraire est tout tracé et balisé. Le caricaturiste Xavier Gorce, né à Chamalières, a fort logiquement choisi de prendre ses clics et ses clacs, affirmant « la liberté ne se négocie pas. » Quant à son compère Plantu, qui quitte également Le Monde, il a ajouté : « Je le soutiens mordicus. J’adore son style. On doit militer pour le décalage. Le sérieux est en train de nous envahir, c’est le cholestérol de l’imaginaire. » Des propos empruntés à Guy Bedos qui n’avait pas sa langue dans sa poche. Mais il s’en est allé…

(Dessin Jean-Louis Gorce en soutien à son confrère Xavier Gorce et pour la liberté d’expression.)

 

À propos de l'auteur

Marc François

A débuté le métier de journaliste parallèlement sur une radio libre et en presse écrite dans les années 80. Correspondant de plusieurs médias nationaux, rédacteur en chef de l’hebdomadaire Info Magazine (Clermont, Limoges, Allier) pendant 9 ans, il a présidé le Club de la Presse Clermont-Auvergne entre 2009 et 2013. Il est l’initiateur de 7 Jours à Clermont.

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  • La vraie difficulté pour nous tous, c’est d’être les témoins d’une société du paraitre et du politiquement correct. C’est probablement parce que nous avons connu autre chose, que la transition est si difficile à accepter !

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