Si je m’écoutais vraiment, j’abandonnerais définitivement la voiture comme on rompt des chaînes. Terminés alors le tarif des assurances qui n’arrête pas de grimper ou celui de l’essence, qui n’est pas prêt de retrouver un cours raisonnable. Terminé aussi ce contrôle technique de plus en plus sévère, de plus en plus contraignant, nouvelle peau de banane placée sous les roues des possesseurs de véhicules. Et les démarches ubuesques pour acquérir une carte grise… Et les problèmes de stationnement- comment « loger » sa voiture en centre-ville? , les heures passées dans les bouchons alors que la vie est déjà courte et qu’elle s’emballe à partir d’un certain âge.
En liberté surveillée
Mais mon désamour pour l’automobile, qui prend parfois des allures de dégoût, tient en premier lieu à d’autres désagréments. Cet objet qui fut synonyme de liberté, d’indépendance, de périples, cet objet qui ouvrait le champ des possibles, à condition de lui consacrer un budget conséquent, est désormais synonyme de stress, de contraintes, de réglementations, de répression. L’automobiliste, observé sous tous les angles, toutes les coutures, suspecté en permanence, traqué sans considération, n’est jamais qu’un citoyen en liberté surveillée et dénué des droits fondamentaux. Comme un repris de justice, à qui l’on accorde une remise de peine, est placé sous bracelet électronique …
La route en déroute
La vitesse portée à 80 km/h sur les routes secondaires – en fait la grande majorité des voies de circulation en France- constitue en quelque sorte le coup de grâce. Épié, contrôlé, matraqué, ponctionné, radarisé, malmené, déresponsabilisé, infantilisé, le conducteur va désormais devoir adopter un rythme de tortue, ou peut-être d’escargot, inadapté évidemment aux qualités des véhicules et aux infrastructures routières. Il lui sera aussi impossible de doubler, sans enfreindre la loi. Et l’on imagine l’enfer vécu derrière les innombrables poids lourds, ces mastodontes terrifiants qui sillonnent sans cesse la France. Les sociétés d’autoroute peuvent se frotter les mains qui vont voir le trafic augmenter considérablement sur leurs voies et le danger, évidemment, y redoubler. La décision gouvernementale, prise sans la moindre concertation, sans beaucoup de recul ou d’analyse et sans recours au parlement, prouve davantage d’aveuglement et d’hypocrisie que d’expertise en matière d’accidentologie. Qu’importe, le premier ministre a signé le décret à l’heure même où d’autres pays du continent, sur la foi de l’expérience, assouplissent les contraintes en matière de limitation de vitesse. Mais sans-doute, les Français, incorrigibles donneurs de leçons, sont-ils des Européens pas comme les autres.
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