Depuis 1974, la galerie d’art clermontoise Christiane Vallé, organise chaque été une grande exposition au château de Val, propriété de la commune de Bort-les-Orgues. David Chabannes, gérant actuel de la galerie a repris le flambeau allumé par son grand-père et se devait de marquer le coup pour célébrer un demi-siècle d’expositions. Il a donc rassemblé avec sa sensibilité propre, les œuvres qui composent la Traversée artistique.
7 Jours à Clermont : Comment avez-vous élaboré cette édition du cinquantenaire au Château de Val ?
David Chabannes : En fait cela fait un an qu’on travaille sur cette exposition, même si cela faisait pas mal de temps que j’y réfléchissais en me disant que je ne voulais pas faire une rétrospective de ces 50 dernières années. Cela ne m’intéressait pas, car les 50 dernières années étaient un demi-siècle d’art « made in Christiane Vallé ». J’avais plutôt envie de partir sur la vision de l’art de David Chabannes.
7JàC : Vous voulez dire que « Traversée artistique » va au delà de votre travail de galeriste ?
D.C : Ce que je fais à la galerie est une chose mais l’art est tellement plus vaste qu’il fallait aller plus loin que cela, surtout pour les 50 ans. Souvent les galeries se tirent un peu la bourre et celles de Paris sont, ou du moins se sentent, un peu supérieures. Là il y a quand même 14 galeries qui sont derrière nous et qui nous ont soutenu pour ce projet. C’est quand même quelque-chose d’incroyable. Il y a même des œuvres qui viennent des États-Unis. J’ai la chance de bien m’entendre avec certaines personnes. J’ai en quelque sorte, des mentors à droite ou gauche qui me suivent.
7JàC : Qui par exemple ?
D.C : Par exemple à Paris en ce moment, il y a une exposition qui s’appelle We are Here, au Petit Palais sur le mouvement Street art. L’un des commissaires Mehdi Ben Cheikh de la Galerie Itinerrance, qui m’a un peu pris sous son aile, m’a dit « tu veux quelque-chose ? prends le. Moi j’expose à Paris, toi en région ».
« On a essayé de présenter notre vision, qui déjà assez large »
7JàC : Comment se sont opérés les choix des œuvres exposées dans cette exposition ?
D.C : En pensant aux personnes qui ont été réticentes à toutes les dernières expositions car elles considéraient que ce que l’on montrait était trop contemporain. On a souhaité montrer comment l’art a évolué et démontrer qu’au final, ce qu’elles ont connu pendant plus de 40 ans, ce n’est qu’une petite parcelle de l’art. On ne peut pas parler de 100% de ce qui s’est fait. On ne peut pas évoquer l’art chinois, l’art coréen ou l’art africain car il y a beaucoup trop de choses. On a essayé de présenter notre vision, qui déjà assez large.
7JàC : Comment avez-vous organisé le cheminement du public de cette exposition ?
D.C : On commence avec les années 30 à 60 et on avance au fur et à mesure sur différents mouvements, tout en restant pour la grande majorité des œuvres sur de la figuration. Il y a quelques notes d’abstrait, même si cela n’est pas notre spécialité.
7JàC : Quelle est la caractéristique principale de Traversée artistique ?
D.C : La force de cette exposition est de présenter autant de grands noms. 62 artistes différents, 84 pièces parfois exceptionnelles. Pour présenter Bernard Buffet, on a pas pris n’importe quelle œuvre, on a retenu celle qui est considérée comme l’une des plus belles, celle qui fait la couverture du troisième tome de la trilogie de l’historien et critique Yann le Pichon sur les plus beaux tableaux de Buffet. On a une œuvre de Sam Francis de 2 mètres alors qu’habituellement on ne voit que des petits formats, mais aussi des Peter Klasen, Moiras, il y a un Invader caché, un Kaws, un Murakami… le dessin de Ernest Pignon-Ernest sur Jean Genet…. en fait, on a regroupé énormément de choses pour montrer comment l’art est complexe. C’est fort de voir cela.
Pour David Chabannes, l’art n’a pas évolué, il a muté
7JàC : Traversée artistique est-elle le reflet de l’évolution de l’art ?
D.C : L’art n’a pas évolué, il a muté. Je ne veux pas entendre le mot évolution car cela signifierait que l’art est meilleur maintenant, or ce n’est pas le cas. Et à l’heure actuelle, il est encore en train de muter. Prenons le street art. On dit que c’est le mouvement à la mode mais il change énormément. Le mur est devenu un support, une surface. Dans cette exposition, on commence déjà à faire ce lien.
7JàC : Cette exposition est privée, non subventionnée, comment gérez-vous la finance et la logistique ?
D. C : Dans cette expo, il y a des œuvres qui m’appartiennent à titre personnel car je suis galeriste mais aussi collectionneur. Il y a des œuvres qui viennent de nombreuses galeries dans le cadre d’accords et d’échanges. On travaille avec des transporteurs pour l’étranger et pour la France, je fais moi-même les transports pour une questions de confiance. Début juillet, j’ai fait le tour de toutes les galeries pour les récupérer, faire mes propres emballages. Je fais beaucoup la logistique par moi-même. Après la logistique il y a aussi le travail avec les assurances, l’encadrement, le catalogue de l’exposition, il y a un gros travail d’imprimerie. Je travaille avec ma femme qui gère la PAO.
7JàC : Que voulez-vous dire pour attirer gens au château de Val et voir cette exposition ?
D. C : Que la notion d’anniversaire est presque à mettre de côté. Pour ceux qui viennent depuis toujours cela vaut le coup de voir cet aboutissement. Mais cela va aussi au delà de cela. Quoi qu’il arrive chacun trouvera quelque chose qui va lui parler, comprendra comment l’art a franchi certaines étapes. Et au delà de l’exposition, il y a aussi ce lieux sublime qui a failli disparaître.
Traversée artistique jusqu’au 27 octobre 2024, château de Val, Lanobre (15)
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