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Dirk Braeckman au Frac / Photo 7 Jours à Clermont
Photo 7 Jours à Clermont
Culture

Dirk Braeckman, le manipulateur

Le FRAC Auvergne présente actuellement "Évidence possible" exposition d'anciennes et récentes créations de l'artiste belge Dirk Braeckman, un travail à la croisée de la photo et de la peinture.

Une multitude de définitions tentent d’expliquer ce qu’est l’abstraction. « Idée ou raisonnement qui porte sur une représentation du réel plutôt que sur le réel lui-même » colle finalement assez bien au travail de Dirk Braeckman actuellement exposé au FRAC Auvergne. Le travail de ce photographe belge brouille les codes de la photographie inventée à l’origine pour figer une réalité dans le temps. Comme l’a écrit Jean-Charles Vergne, directeur du FRAC Auvergne, à propos des oeuvre de Braekman : « Il ne s’agit donc pas de rendre compte d’un instant vécu, il ne s’agit pas de produire des instantanés, mais de produire le récit d’un regard, de restituer la façon dont le souvenir d’un lieu sédimente jusqu’à n’être plus un souvenir mais un tableau en soi, un monde refermé sur lui-même se livrant rétrospectivement dans son instabilité, dans son évanescence, dans le léger flottement d’une lumière grise dont les tons demeurent impossibles à fixer dans la mémoire ».
Visiter Évidence possible est un appel à user de la capacité à imagine et à interpréter. Le photographe ne donne pas vraiment d’indication dans ses images, ni même un titre sur un cartel qui pourrait mettre sur la voie. Chacun se débrouille avec ce qu’il a devant les yeux : une femme, un paysage, le fragment d’un intérieur ou d’un édifice, une chose abstraite qui pousse à l’émotion ou l’invention d’une situation.

La réflexion plutôt que la contemplation

Donner à imaginer plutôt qu’à voir est une forme de manipulation intellectuelle, puisqu’elle balaie l’idée même de la contemplation pour provoquer l’action. Mais chez Dirk Braeckman, la manipulation est aussi technique. Pas vraiment du genre à photographier puis à tirer directement sur un support, il bricole ses négatifs ou ses fichiers, superpose les couches, ajoute des paillettes, utilise les défauts volontaires ou pas, oublie ses images pour mieux les interpréter ensuite, travaille sur le grain, se délecte du flou, baisse les contrastes au maximum pour obtenir un gris à la limite du monochrome. Quelques œuvres, traitées en couleur avec une démarche similaire, rapproche encore plus son travail de celui du peintre qu’il n’a jamais cessé d’être, Photographie ou peinture qu’importe finalement. Quel intérêt de comprendre la technique ? L’idée ultime est bien de bâtir un monde subjectif et obligatoirement personnel.

(c) Dirk Braeckman / Photo 7 Jours à Clermont

L’art de ne pas choisir entre deux techniques

Dirk Braeckman, né en Belgique en 1958, s’est intéressé dès sa jeunesse à la photographie. Par l’intermédiaire de son ami peintre, Willy Pauwels. il se passionne pour l’art et devient peintre lorsque celui-ci disparaît prématurément. À l’Académie royale des beaux-arts de Gand, entre 1977 et 1981, il étudie la peinture mais aussi la photographie car il veut maîtriser et comprendre le médium de l’appareil photographique afin de pouvoir l’utiliser dans sa peinture. À la fin de ses études, il ouvre la galerie/studio XYZ et crée un magazine du même nom à Anvers. Pour des raison matérielles, il est contraint de faire un peu de travail de commande et du reportage, mais commence, sur son temps libre, à expérimenter dans son laboratoire. Il souhaite jouer avec la lumière et teste des substances chimiques, afin d’ajouter une dimension supplémentaire à ses photos. Fermant son studio en 1989, il part pour New-York, restant dans une sorte de marginalité artistique. Quand les uns veulent à tout prix, figer des instants d’une époque foisonnante, il préfère travailler sur des images qui rejettent le caractère anecdotique et le sujet même de la photo. Cela deviendra un trait principal de son œuvre, située sur la très mince frontière qu’il a défini entre photographie et peinture.

Dirk Braeckman Évidence possible jusqu’au 14 mai 2023, FRAC Auvergne, entrée libre et gratuite du mardi au samedi de 14h00 à 18h00 et le dimanche de 15h00 à 18h00, 6 rue du Terrail à Clermont.

À propos de l'auteur

Olivier Perrot

Pionnier de la Radio Libre en 1981, Olivier Perrot a été animateur et journaliste notamment sur le réseau Europe 2 avant de devenir responsable communication et événements à la Fnac. Président de Kanti sas, spécialisée dans la communication culturelle, il a décidé de se réinvestir dans l'univers des médias en participant à la création de 7jours à Clermont.

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