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Cédric Villani / Photo Olivier Perrot
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Histoire

Cédric Villani : Blaise Pascal ? Tout le monde l’aime !

Cédric Villani a ouvert les commémorations du quadri-centenaire de la naissance de Blaise Pascal. Avant d'animer une conférence exaltante à l'UCA, et après avoir rencontré des scolaires, le mathématicien et homme politique a pris le temps de temps d'évoquer Pascal avec la presse.

Quel est le meilleur moyen pour aborder Blaise Pascal ?
Je pense qu’il n’y a pas un moyen, il y a en a plusieurs. L’œuvre de Pascal est pleine de facettes multiples, lui-même est plein de facettes avec ses contradictions. J’avais potassé, comme tout le mode, Les Pensées en cours de philo, je les ai repotassées et je les ai trouvées bien plus passionnantes que ce que j’avais en tête. La forme, le fait que cela soit fragmenté, le rend plus poétique et plus riche, pas forcement plus convainquant au sens où Pascal le voulait, mais il y a toutes sortes de points de vues différents. Il n’y a donc pas une façon d’aborder l’œuvre de Pascal, il faut le faire par différentes faces.

Pascal est-il une de vos références ?
Quand je me suis replongé ces derniers mois pour préparer ce quadri-centenaire, j’ai pu approfondir des choses sur lesquelles j’étais passé et je me suis rendu compte qu’elles étaient bien plus riches que ce dont je m’étais rendu compte. Ensuite, ma propre expérience politique m’a permis d’apprécier personnellement certaines de ses réflexions : sur Paris, sur la façon dont nos habitudes conditionnent les choses que nous pensons, sur l’impossibilité de séparer l’émotion de la raison et ainsi de suite.

Pascal est-il assez connu du grand public ?
Certainement pas assez, mais on peut le dire de tant et tant de monde. Le mot qui vient en premier est philosophe, mais on ne peut pas séparer la philosophie des différents aspects de la personnalité de Pascal, y compris quand on parle du mathématicien et du physicien. Témoin et acteur de son temps, il est impliqué dans les grands débats, à un moment où Descartes dit qu’il faut repartir de zéro. Pascal n’est pas le premier à se lancer dans l’interprétation mais on a l’impression qu’il se lance dans le débat en voulant mettre ses adversaires KO. 

Cédric Villani 3 / Photo Olivier Perrot
Photo Olivier Perrot

Pascal est-il encore d’actualité ?
Au XVIIIe et au XIXe siècle, les scientifiques ne savaient pas comment ranger Blaise Pascal. Les scientifiques mais aussi les philosophes de l’époque n’aimaient pas trop son côté religieux, sa façon de nier l’existence de vérité absolue. Ils le faisaient plutôt passer au second plan. Pascal revient en force extraordinairement au XXe siècle. Tout le monde l’aime ! et encore aujourd’hui. Les Marxistes l’aiment beaucoup parce qu’il est le roi de dialectique, les écologistes l’aiment parce qu’il insiste sur le lien entre les choses plutôt que sur la nature des choses. Tout le monde retrouve dans Pascal les interrogations, le doute, les passions qui reviennent de manière extrêmement fortes quand arrivent les grandes guerres, les grands doutes sur l’idée même de progrès.  C’est quelqu’un qui est inspirant et fascinant, même s’il n’est pas très prolixe.

Pascal œuvrait-il avec passion ?
Pascal est quelqu’un qui est plein de passions et qui le fait ressentir, parfois avec du tragique, parfois avec de la joie. Il est heureux comme un gamin quand il trouve une bonne démonstration, il est fier, y compris quand il dialogue avec Pierre de Fermat considéré comme le plus grand mathématicien de son époque. Il prend plaisir à attaquer ses adversaires, parfois même avec de la mauvaise foi. Pascal est introverti, mais en même temps un homme du monde. Il n’a jamais mis les pieds hors de France… Clermont, Paris, Port Royal près de Versailles mais il passe son temps à se préoccuper des problèmes du Monde. 

Pascal était-il avant-gardiste ?
On peut voir Pascal comme le tout premier entrepreneur de la Tech, bien avant Steve Jobs qui prétendait changer la vie avec son petit smartphone… Sa Pascaline était tellement simple qu’il n’y avait pas besoin de mode d’emploi, mais il donnait une lettre dans laquelle il tutoyait les gens en expliquant qu’il l’avait inventé pour rendre service mais qu’il fallait se méfier des faussaires… un vrai bonimenteur.
Si l’on parle d’héritage technologique, la Pascaline à, sans aucun doute, changé la vie des gens parce que c’est la première machine automatique industrialisable. Il l’avait standardisé dans l’idée que ce serait une vraie entreprise et que son utilisation allait se répandre. Cela n’a pas été un succès commercial mais c’était la première fois que l’on inventait une machine qui automatise un raisonnement, que l’on mécanisait les mathématiques. Cela était extrêmement moderne à l’époque. 

Cédric Villani 2 / Photo Olivier Perrot
Photo Olivier Perrot

À propos de l'auteur

Olivier Perrot

Pionnier de la Radio Libre en 1981, Olivier Perrot a été animateur et journaliste notamment sur le réseau Europe 2 avant de devenir responsable communication et événements à la Fnac. Président de Kanti sas, spécialisée dans la communication culturelle, il a décidé de se réinvestir dans l'univers des médias en participant à la création de 7jours à Clermont.

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