Avec son prénom d’origine germanique, sorte de superlatif d’Albert désignant une personne noble et brillante, Alberic Aubert n’est pas l’architecte clermontois le plus connu. Moins célèbre que Valentin Vigneron ou Marcel Depailler, on lui doit pourtant quelques édifices remarquables aujourd’hui entrés dans le patrimoine bâti de Clermont et représentatifs de l’époque Art déco et du Mouvement Moderne.
Né dans la capitale auvergnate en 1895, Alberic Aubert étudie l’architecture à l’École des beaux arts de Paris dont il sort diplômé en 1925. Patenté en 1927, il revient travailler dans sa ville natale où il est nommé architecte des hospices de Clermont en 1930, prenant le relais de Jean Amadon.
Les avantages du béton armé
Dès 1928, Alberic Aubert utilise la technique du béton armé qui autorise la création de structures faites de piliers et de poutres, permettant la suppression des murs porteurs de façade. Ainsi l’épaisseur des murs peut être moindre rendant de la surface habitable. Cette technique lui sera bien utile pour l’une de ses premières réalisations, l’Hôtel de Bourgogne, avenue Charasse, construit sur une petite parcelle triangulaire d’à peine 102m². À la fin des années 20, le geste architectural moderniste tranche avec les usages en cours dans la ville. Les bas-reliefs à motifs floraux signés du sculpteur clermontois Gustave Gournier lui apportent l’aspect art déco toujours en vogue à l’époque. Aujourd’hui encore, dans le quartier de la gare, cet immeuble détonne par sa forme et son esprit.
Deux pièces maîtresses pour les Hospices
La première réalisation d’Aubert, en tant qu’architecte des Hospices, est le pavillon Émile-Roux à l’entrée de l’Hôtel-Dieu, avenue Vercingétorix. Construit entre 1931 et 1935, ce bâtiment est remarquable par son revêtement en brique à motifs géométriques et ses bas-reliefs en grès qui relèvent de l’Art-Déco. Sur la façade figure l’inscription Clinique et laboratoire des maladies sociales, Pavillon Émile Roux qui révèle la vocation d’origine de l’équipement : la lutte antivénérienne. Fort heureusement classé par les Monuments Historiques, le pavillon a échappé aux démolitions du programme Hôtel-Dieu. Transformé en immeuble de bureau, il fait aujourd’hui figure de gardien du temple d’une qualité d’architecture hélas disparue avec les bâtiments récents qui le côtoient et qui font bien pâle figure.

La second bâtiment qui a marqué le passage d’Alberic Aubert dans le monde de la médecine, est l’Hôpital Sabourin, sanatorium construit entre 1932 et 1935 sur les coteaux du puy de Chanturgue. Il a alors 35 ans. Très inspiré des théories de Walter Gropius et du Bauhaus, l’immeuble étroit et de 96,7 mètres de long développe 9 200 m² et peut accueillir 200 lits. Valentin Vigneron qui a travaillé avec Aubert en début de carrière, a sans doute pris une part importante dans ce projet sans que son nom apparaisse officiellement. Cela créa polémiques et controverses. Bourré d’innovations à sa construction, endommagé durant la guerre, Sabourin fut désaffecté en 1997 et laissé à l’abandon. Malgré un permis de démolition accordé par la ville, la mobilisation d’un groupe de militants soutenu par le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes permit de le faire classer par les Monuments Historiques. Sauvé in extrémis, il fut racheté par l’État pour y installer, après requalification, l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Clermont-Ferrand. Juste retour des choses.

Les bâtiments d’Alberic Aubert ont façonné le paysage clermontois
Par la suite Aubert réalisa de nombreux bâtiments emblématiques que les clermontois ont intégré dans leur quotidien, passé ou présent, ignorant très souvent qu’il en est l’architecte.
La faculté de médecine et de pharmacie, (aujourd’hui très légèrement modifiée par un ajout en porte-à -faux) devenue école de management de l’UCA à l’angle Lagarlaye – De Gaulle, le lycée Rogers Claustres né Bel-ombre sur les côtes de Chanturgue, l’étonnante église Saint Jean-Marie Vianney à la frontière entre Vallières et Beaumont ainsi que de nombreuses résidences et sa propre villa boulevard Jean-Jaurès à Clermont. Alberic Aubert meurt en 1971 à l’âge de 76 ans, laissant un patrimoine architectural assez riche mais ne bénéficiant pas d’une reconnaissance nationale, à l’image de ses confrères clermontois contemporains : Bernard, Guillot, Lanquette, Marquet, Papilliard, Pincot ou Pouzadoux.

Pour aller plus loin dans la (re)découverte : Architectures remarquable du XXe siècle en Auvergne aux Éditions de la Flandonnière.
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