En ces temps-là, la région n’était pas le centre du monde mais peut-être celui de la France. Un président de la République auvergnat venait de décéder. Un autre « local » se présentait devant les électeurs avec la ferme intention de lui succéder. Giscard ? Un homme brillant, disait-on, un jeune loup aux dents longues qui avait occupé le poste délicat de ministre de l’économie et des finances. Une pointure qui traçait son chemin avec détermination…Son handicap ? Il n’appartenait pas à l’écurie dominante, le clan gaulliste, incarné durant cette campagne par Jacques Chaban-Delmas, ancien résistant et compagnon d’armes du Général.
New age
Mais ce handicap supposé pouvait se révéler un atout majeur dans un pays désireux d’évolution et de transformation, six ans seulement après l’électrochoc de mai 68.
De fait, Giscard allait « dépoussiérer » le contenu des campagnes électorales, adoptant un style à l’américaine. Les t-shirts « Giscard à la barre » fleurissaient, synonymes d’un « new age » de la communication politique… Et après avoir pris le pas sur Chaban, il triomphait au second tour de François Mitterrand dont l’heure n’avait pas encore sonné. De l’Hôtel de Ville de Chamalières jusqu’au palais de l’Élysée ou l’irrésistible ascension d’un homme qui collait assez bien à son époque et allait débuter son mandat tambour battant. La France gaulliste avait vécu… Celle de Giscard ne durerait guère toutefois. La popularité s’essouffla, au détour d’une première crise pétrolière et quelques fausse-notes grippèrent la machine. Le charme était rompu. Et VGE, bien avant Nicolas Sarkozy, fut, en 1981, le premier tenant du titre battu lors d’une élection présidentielle. L’espace d’un mandat, il avait beaucoup vieilli. Ce fut alors, et pour 14 ans, le temps de François Mitterrand.
Des regrets indélébiles
De cette blessure vive, celle d’une défaite qu’il ne comprenait pas, il ne se remit jamais tout à fait. L’homme politique songea longtemps à un possible retour à l’Elysée. Malgré la déchirure, en dépit de cette illusion, Giscard fut élu, en 1986, à la présidence de la Région Auvergne, fonction qu’il exerça durant dix-huit ans mais qui ne correspondait sans doute pas à ses ambitions et à la haute idée qu’il se faisait de lui-même. En fait, Giscard était devenu Président de la République si tôt que sa « deuxième vie » ne pouvait lui paraître que longue et insipide.
Elle a pris fin hier soir et, ce matin, les hommages se succèdent pour saluer celui qui fut un centriste, un libéral, un réformateur et un Européen convaincu.
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