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Sculptures Dubuffet Photo 7 Jours à Clermont
Sculptures Dubuffet / Photo 7 Jours à Clermont
Culture

Thomas Wierzbiński : Une saison à la tête du Doyenné

Directeur-conservateur du Doyenné à Brioude depuis un an, Thomas Wierzbiński s'apprête à refermer l'exposition 2025 "Jean Dubuffet, le défi au quotidien" en tirant un premier bilan positif sur plusieurs points.

Ce weekend de la Toussaint sera marqué par la clôture de Jean Dubuffet, le défi au quotidien, exposition temporaire 2025 présentée par Le Doyenné. Cette exposition était la 8e de l’espace d’art moderne et contemporain de Brioude, mais la première pour Thomas Wierzbiński, arrivé en 2024, en tant que directeur-conservateur. Il l’a conçue à quatre main avec Jean-Louis Prat, en collaboration avec la Fondation Dubuffet.
Avec cette proposition, le mot « défi » a pris tous son sens : Pour Dubuffet, d’abord, artiste hors normes qui s’est toujours lancé des défis pour créer une œuvre profondément originale, pour le Doyenné, ensuite, qui avec ce choix d’artiste, a monté le curseur de l’exigence comparativement aux premières expositions plus facile d’accès.

« Une approche effectivement un peu plus difficile »

Olivier Perrot : Quelle a été la motivation de faire passer le format de l’exposition de 3 à 4 mois ?Thomas Wierzbiński : Habituellement on ferme début octobre, car nous sommes rattachés aux conditions des prêteurs. La Fondation Dubuffet nous a accordé des prêts plus longs et on a voulu tester cette période d’octobre pour ouvrir davantage de créneaux scolaires et se poser la questions des vacances durant lesquelles vient le dernier noyau de visiteurs locaux, qui peuvent aussi venir en famille.

O.P : Cette année, Le Doyenné ne vas pas dépasser le record du nombre d’entrées de 48 525 pour l’expo Picasso, mais considérez, cependant, vous que cette saison est une belle saison ?
T. W : Oui c’est une très belle saison puisque l’on a dépassé les 23 000 visiteurs en dehors des scolaires. On atteindra les 27 000 au total. Le public est au rendez-vous sur un artiste qui est peut-être un moins consensuel que Miró, ou Chagall, avec une approche effectivement un peu plus difficile. C’est tout l’intérêt des visites guidées sur lesquelles on a une demande très forte. On a deux médiateurs qui partent toutes les heures avec des personnes qui veulent être accompagnées. Il y a bien sûr les cartels pour comprendre l’œuvre de Dubuffet, mais être accompagné par un médiateur qui plonge dans l’histoire de Dubuffet, c’est beaucoup plus facile et aidant.

O.P : D’où viennent généralement les visiteurs ?
T.W : On reste sur le bassin de Clermont et le département, ce public est assez important et puis on a un public parisien, qui descend ou remonte du sud par l’autoroute ou qui a des résidences secondaires. On a pas encore étudié et détaillé l’ensemble de nos chiffres mais on fonctionne aussi avec un noyau de fidèles. On rencontre des gens qui reviennent et qui nous disent avoir vu toutes les expositions depuis le début.

O.P : Quel est le profil des visiteurs qui viennent à Brioude pour Dubuffet ?
T.W : On a eu ce noyau de visiteurs qui a fait l’effort d’envisager le déplacement et qui se disent « oui Dubuffet c’est un artiste assez curieux, il est atypique dans son parcours. On reconnaît son style, il a une démarche très singulière et il faut rentrer dans son monde, dans ses créations ». Notre exposition, en plus, présente 40 ans de création et 40 ans ponctués de chapitres qui sont radicalement différents. Entre un Dubuffet qui va être sur la peinture à l’huile, sur les matériaux, qui passe sur la sculpture avec l’Hourloupe, qui réduit sa palette, qui va la rouvrir, qui va partir sur des papiers coupés et assemblés, jusqu’à l’abstraction… il faut arriver à le suivre pendant 40 ans… la médiation permet ces explications.

(c) Dubuffet
(c) Dubuffet

« C’est notre choix au Doyenné de pousser l’interaction »

O.P : Justement est-ce que cette médiation a été plus importante que pour les expositions précédentes ? T.W : On a eu beaucoup de visites guidées, beaucoup plus que les années précédentes et cela fait toujours plaisir d’avoir un public qui souhaite une médiation physique. On aurait pu partir, comme d’autres sites, sur une médiation d’audio-guide mais c’est notre choix au Doyenné de pousser l’interaction, avec trois médiateurs présents. On offre la possibilité aux gens de pouvoir discuter, d’avoir une heure où ils sont plongés dans le discours, de pouvoir poser des questions, de dire si cela leur plaît ou non ou de dire qu’ils n’ont pas compris.

O.P : Hans Hartung en 2024, Jean Dubuffet en 2025, vous avez un  monté le niveau d’exigence pour le public…
T.W : Il y a eu l’intelligence dans la stratégie du Doyenné de commencer par des artistes très grand public, comme Chagall, Miró, Picasso… afin d’apporter une base en éducation artistique et culturelle, pour ensuite amener des artistes moins faciles et moins connus. Je pense effectivement à Hans Hartung ou Dubuffet. Des gens nous disent que ces artistes ne leur parlent pas, mais qu’ils viennent, car ils ont toujours passé ici un très bon moment. Ils ajoutent qu’ils n’ont pas forcément les moyens d’aller dans les grandes villes, mais ils savent qu’ici, ils ont une offre comme celle qu’ils pourraient retrouver à Paris, Lyon ou Marseille.

O.P : Ce public a-t-il, de ce fait, un comportement particulier ?
T.W : Cela fait plaisir de constater cette appétence exceptionnelle. Je l’ai précisé à l’équipe quand j’ai pris mes fonctions, je n’ai jamais géré un site avec autant de visites guidées et autant de catalogues vendus. On tire le catalogue à 3 000 exemplaires, et on en vend 2 000 par exposition, ce qui est colossal. Cela montre que l’on a un visiteur qui après la visite guidée, à envie de garder un souvenir et de continuer l’aventure dans les écrits du catalogue, de Dubuffet ou des autres artistes présentés.

O.P : La saison 2025 aura été marquée par la mise en œuvre d’actions complémentaires, c’est une mission que vous vous étiez fixée ?
T. W : Quand j’ai pris mes fonctions, il y a un peu plus d’un an, j’avais cette volonté, comme pour les autres lieux que j’ai géré, de développer toute une programmation. On a certes l’exposition, mais on aussi comment aborder, le lieu et l’exposition différemment. Il y a eu les ateliers pour le jeune public, ce qui n’avait pas été fait auparavant et une balade musicales avec une violoncelliste ukrainienne pour voir comment associer des morceaux de musique classique ou contemporaine avec des œuvres du Dubuffet. On a également fait une soirée « art et vin » ce qui avait du sens puisque Dubuffet avait été négociant en vin, on voulait voir comment faire des liens entre la couleur et les vins. On a aussi eu des cours de modèle vivant ou de yoga puisque Dubuffet abordait la question du bien-être, de la relation au corps.

O.P : C’était aussi une manière de mieux s’approprier le lieu ?
T. W : L’idée est d’avoir un sens avec les œuvres présentées mais aussi d’apporter un autre rapport au bâtiment. Quand on est dans un Doyenné finalement privatisé, il y avait vingt personnes pour art et vin, on est dans un lieu silencieux, dans une autre ambiance avec moins de lumière naturelle, on a une autre appropriation du lieu et on découvre l’exposition différemment. Tout cela apporte une plus-value.

« j’ai passé 4 mois en constatant l’engouement partagé »

O.P : Quel bilan de votre première saison à la direction du Doyenné ?
T.W : L’association avait partagé cet attachement très fort au Doyenné, de nos visiteurs et des locaux, j’entends les habitants du territoire et les commerçants. Mais il y a une différence entre le savoir et le vivre. Effectivement j’ai passé 4 mois en constatant l’engouement partagé des visiteurs et leur plaisir à être ici. Ils l’écrivent dans le livre d’or et remercient la qualité de l’exposition. C’est un vrai marqueur et une manière de se rendre compte à quel point on est attendu mais aussi de l’importance du Doyenné pour le développement du territoire. Les commerçants nous le disent, les visiteurs vont ensuite au restaurant, consomment, circulent dans le centre-ville.

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À propos de l'auteur

Olivier Perrot

Pionnier de la Radio Libre en 1981, Olivier Perrot a été animateur et journaliste notamment sur le réseau Europe 2 avant de devenir responsable communication et événements à la Fnac. Président de Kanti sas, spécialisée dans la communication culturelle, il a décidé de se réinvestir dans l'univers des médias en participant à la création de 7jours à Clermont.

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