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Pelouse arrosée / Photo Davie Bicke Pixabay
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Chroniques

Pour que l’herbe soit (plus) verte

A un mois d’écart, les deux têtes de gondole du sport auvergnat ont repris du service, portées davantage par des interrogations que des certitudes. Les footeux ont pris la mesure de la tâche qui les attend pour confirmer leur statut pendant que les rugueux continuent de fourbir leurs armes dans l’espoir d’un futur plus convainquant que le passé récent.

Les deux sont entrés dans une phase de reconstruction, sans savoir s’ils en sortiront assez tôt pour assumer leurs ambitions respectives. Du côté des rouges il s’agira « tout simplement’ » d’éviter les places de 17 à 20 afin de rester en L1, et chez les jaunes de retrouver un Top 6 où ils avaient leurs habitudes afin de viser un troisième Bouclier. En résumé, les uns surveilleront surtout leurs arrières tandis que les autres s’efforceront de porter le regard vers le haut. A chacun ses outils.

Tourner la page sans bruit

Pour reconstruire, comme dans le bâtiment, on peut s’appuyer sur des matériaux anciens qu’il conviendra de conforter et d’enjoliver avec du neuf, sinon du clinquant. Mais, entre le rugby et le foot, la différence réside dans le fait que les transferts de joueurs sont des ajustements chez les uns alors qu’ils relèvent souvent du pur bizness chez les autres. Au soir de leur dernière apparition au Michelin, début juin dernier, les duettistes Parra et Lopez se voyaient rendre un dernier et juste hommage pour leurs contributions à l’histoire du club.
En même temps que se tournait la page, le président Jean-Michel Guillon ne cachait pas que les gros salaires partis (dont Matsushima et la retraite négociée de Fofana) donneraient un peu d’air à une trésorerie devenue déficitaire de 3M€ après deux années de Covid et une certaine fuite des spectateurs désenchantés.
Pour repartir au combat des chefs, le recrutement des Plisson, Belleau, Hériteau, Godener et des sudistes Delguy, Newsome et Simone s’est inscrit dans un budget prévisionnel de 30M€ (dont 4M€ pour le fonctionnement du stade) voisin de celui de la saison précédente. Sachant que le budget est une chose et que les performances en sont une autre. Voir le Stade Français et ses 39,1M€ terminant la saison dernière dans les choux à la 11e place tandis que le Castres Olympique, premier de la phase régulière et finaliste, plafonnait à 22,8M€. L’ASM menant culturellement sa barque sans fumée sur une mer calmée, on pouvait penser qu’il en serait de même chez le voisin du Clermont Foot dont le dernier psychodrame remontait à 2005.

Parra Lopez / Photo Yves Meunier
Photo Yves Meunier

On est pas chez les Bisounours

Cette année-là, le président Dalan, pilote du navire de la division d’honneur jusqu’à la Ligue 2, était en bisbille avec les trois autres administrateurs. La mairie, n’acceptant pas que ceux-ci prennent le pouvoir, leur passa la corde au cou tels les bourgeois de Calais, et leur imposa de rendre les clés du club non aux anglais mais à Claude Michy garant d’une gestion « très auvergnate ». Ceci jusqu’à la vente à la holding Core Sport dirigée par le Suisse Ahmet Schaefer qui, avec un peu plus d’ambitions, paraissait devoir naviguer en père peinard sur la grand mare d’une Ligue1 en constante agitation médiatico-politico-judiciaire.
Sauf que la surprenante éviction de Jérôme Champagne, partenaire et conseiller indissociable du président, est venue rappeler qu’à la différence du rugby le système foot est avant tout une affaire de bizness, agrémentée « d’une lutte d’égo et de jalousie »(1). Sans scrupules, la sono du Montpied pouvait quand-même envoyer « l’amour toujours » des électro-clermontois Kimotion accompagnant l’entrée des joueurs pour l’ouverture contre le PSG.
Nous avions déjà relevé l’affirmation d’Ahmet Schaefer : « …il s’agit de développer des valeurs de transfert de joueurs, car je suis un businessman. On est là pour faire des affaires »(2) A cet égard, la balance commerciale du Clermont-foot à l’approche de la clôture du mercato apparait significative :
Les ventes de Bayo à Lille, Abdul Samed à Lens, Hountondji à Angers et Chader à Lucerne sont estimées à un peu plus de 21M€ contre 2,3M€ de dépenses cumulées pour les arrivées d’Andric (Zagreb) et Wieteska (Varsovie), les autres recrues étant ‘’libres de droits’’(3), ça fait de la marge. Parmi les budgets les plus modestes de L1 avec 36,3M€ dont les trois-quarts assurés par les droits TV et CVC, la société commerciale de la Ligue, le CF63 est peut-être le roi des bons coups…l’avenir le dira.

J. Champagne "bâillonné" / Photo Yves Meunier
J. Champagne « bâillonné » / Photo Yves Meunier
M. Bayo / Photo LOSC
M. Bayo / Photo LOSC

Ajustements

Avenue de la République, les données sont bien différentes. La manne des droits TV ferait plutôt figure d’obole avec 17% des recettes face à la billetterie (20%) et au partenariat de 550 entreprises qui apporte 15M€, soit la moitié du budget de l’ASM Clermont.
Si, comme c’est le cas au foot depuis longtemps, le système du retour sur investissement de formation est en train de se mettre en place afin que les clubs puissent toucher quelques dividendes lors des transferts, les mouvements de joueurs ne sont pas productifs au point d’en faire un bizness.
Exemple avec le départ anticipé de Camille Lopez à Bayonne à un an du terme de son contrat. Les bonnes relations avec le club basque (et avec l’intéressé) ont fait fi des affaires d’argent et l’Aviron n’a pas eu à piocher dans sa caisse pour accueillir l’enfant du pays. C’est- t-y pas beau !
Quant à la désertion de Franck Azéma à deux ans de l’expiration de son contrat, la procédure court toujours avec, probablement, les prudhommes en point de mire. C’est moins cool. Dans l’autre sens, le recrutement de l’ailier international argentin Bautista Delguy en provenance de l’USAP où son contrat devait courir encore pendant un an, a donné lieu à une transaction d’environ 250 000€ selon nos sources catalanes. Quelques clubs du Top14 ont les moyens de s’offrir des rachats de contrats plus onéreux… mais les autres, y compris l’ASM, n’ont pas forcément un milliardaire à leur tête pour faire briller le carnet de chèques en déjouant les arcanes du salary cap.

.Delguy “Bautista Delguy” / Photo sport.fr
“Bautista Delguy” / Photo sport.fr

Bizness ou pas, pour que l’herbe soit plus verte et que le champagne pétille en fin de saison, il faudra avoir choisi les bons ouvriers qui feront le bon collectif sans lequel….
(1) J. Champagne à France3 (2-08-22)
(2) Le Point (6-08-21)
(3) Source Transfermarkt

À propos de l'auteur

Yves Meunier

Bourbonnais originaire de Gannat où il s’est essayé au rugby sous le maillot de l’ASG pendant une douzaine d’années. Diplômé d’Etudes Supérieures en Sciences Economiques à l’Université de Clermont. Journaliste à France3 Région de 1972 à 2007. Aujourd’hui impliqué avec des amis dans une aventure viticole du côté de Saint-Emilion et toujours en prise avec le sport auvergnat au sein de l’Union des Journalistes de Sports en France.

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