Il y a sans doute derrière le phénomène des Gilets jaunes beaucoup de mépris et d’indifférence de la part des pouvoirs publics et des élites en général pour ces catégories dont on ne parle jamais. Des Français ni in, ni out, trop nombreux pour appartenir à des minorités, trop banaux pour attirer l’attention. Bref, des citoyens pas bankable qui font les frais des politiques publiques depuis des décennies. Les Gilets jaunes, c’est un peu l’histoire de beaufs qui, subitement, en auraient marre de prendre des baffes. Non pas la fronde d’une France déclassée mais celle d’une frange de la population ignorée et tenue à l’écart. A qui l’on ne donne plus la parole…Une France du milieu qui en a assez d’avoir le cul entre deux chaises…
Sans culottes ou sans dents?
Le prix du carburant et l’instauration de taxes vertes constituent vraisemblablement un prétexte ou simplement la goutte de pétrole qui fait déborder le vase au beau milieu d’un océan d’incompréhension, d’indifférence et de malentendu. L’actuel mouvement de masse témoigne non seulement de l’éloignement de pouvoirs publics technocratiques, gouvernant souvent dans des tours d’ivoire, mais signe aussi une forme d’échec pour tous les corps constitués. Les syndicats, fort peu représentatifs en France, (ils regroupent environ 11% des salariés) sont ici absents des débats, inaudibles, dépassés, à côté de la plaque. Qui défendre, en effet ? La veuve ou l’orphelin ? Le smicard ou le petit patron ? L’automobiliste ou le retraité ? Le sans culotte ou le sans dents ?
L’exemplarité fait défaut
Face à ce phénomène qui surgit subitement mais ourdissait en silence, comme le feu couve, le pouvoir semble pris au dépourvu. Il avait tout prévu, peut-être, sauf cela. Assimiler ces Gilets jaunes à un bataillon d’extrémistes, aux idées rétrogrades et complotistes, tiendrait en tous cas d’une analyse partielle donc erronée. Le mécontentement est plus général, plus diffus, plus profond, plus composite et complexe. Il tient aussi au manque de cap, à la grande foire engendrée par la mondialisation, au bouleversement issu de le « technologisation » de la société. Sans oublier l’exemplarité qui fait cruellement défaut à nos représentants, plus prompts à imposer aux autres qu’à s’auto-discipliner et suivre leurs propres instructions. Les Gilets jaunes ne sont pas en dehors de leur époque, ils sont, eux aussi, dans l’air du temps…
Commenter