En tenant compte des dernières mesures annoncées par le gouvernement, Défonce de rire, le café théâtre de la rue Saint-Dominique, ne pourrait accueillir que 18 personnes en salle alors qu’il en contient officiellement 87 pour 75 réelles. « Les conditions sanitaires sont inapplicables » déclare Yoann Combronde, le gérant du théâtre. En l’état, Défonce de rire ne peut pas rouvrir. « Quand le Premier ministre nous a autorisés à ouvrir à l’annonce de la phase 2 du déconfinement qui prenait effet au 2 juin, les comédiens devaient être masqués et devaient garder la distanciation sociale sur scène ! Heureusement, dans la foulée, un décret a assoupli les mesures pour permettre aux comédiens de faire ce qu’ils veulent sur scène. » L’assouplissement des règles quant à elles ne s’appliquent évidemment pas aux spectateurs qui doivent respecter la distanciation physique et le port du masque. « Le port du masque signifie que les spectateurs n’ont pas accès à la restauration et à la boisson. 18 personnes sans restauration, on n’est absolument pas rentables. On préfère rester fermés. »
Optimisme, malgré tout
Yoann Combronde n’envisage donc l’ouverture qu’après assouplissement des règles et sans condition. Cependant, il est optimiste. « À partir du moment où on peut se serrer dans les transports publics, où la SNCF ouvre ses réservations à toutes les places sans distanciation sociale à partir du 15 juin, il n’y a pas de raison que nous ne bénéficions pas des mêmes mesures. Aux prochaines annonces gouvernementales du 22 juin, on espère voir levées toutes les restrictions. » Si c’est le cas, Défonce de rire rouvrira ses portes en août. Prévoyant, Yoann Combronde a maintenu sa programmation à partir d’août en prévision d’un retour “à la normale”. Le théâtre pourra donc redémarrer assez rapidement. « Il nous faudra un bon mois pour annoncer les spectacles et tout remettre en branle. »
Une économie fragile
Défonce de rire emploie un temps plein, deux temps partiels ainsi que Yoann Combronde et des intermittents. « On est aussi producteurs, on fait tourner des spectacles en France. En ce qui concerne l’indemnisation des intermittents, on ne sait pas exactement ce qu’il en est. Il y a eu une annonce, mais rien dans le décret. On a contacté Pôle Emploi, à ce jour, ils n’ont eu aucune info à ce sujet. Il y a eu un amendement de signé promettant que quelque chose serait fait jusqu’en août 2021, mais on ne sait pas encore quoi, comment et sous quelles conditions. Pour l’instant, les intermittents sont indemnisés, mais ils ne savent pas encore ce qu’il va se passer à la reprise. » Les salariés du théâtre quant à eux, ont été mis en chômage partiel. Prudent, Défonce de rire a sondé son public pour savoir s’il répondra présent à la réouverture : « 95 % du public sera là. Il n’y a pas d’inquiétude, pas d’appréhension. Les gens feront attention, mais ils viendront. Il n’y a pas de psychose. C’était notre crainte. Par contre, si on doit rouvrir cet été sans climatisation, puisque pour l’instant, c’est interdit, dans une salle pleine avec un public qui porte un masque, les gens ne viendront pas, ou alors une fois pour soutenir le lieu. Pour l’instant, avec les mesures actuelles, ce n’est pas viable. On ne veut pas proposer au public un spectacle au rabais. Si on redémarrait l’activité et qu’on apprenne qu’un foyer de contamination a éclos dans un théâtre, avec les chaines info qui tournent en boucle, ce serait une catastrophe pour toute la scène, privée et publique. C’est pour ça que le gouvernement est plus prudent avec le monde de la culture qu’avec d’autres filières parce qu’on risque d’être plus impactés. » Les représentations annulées depuis l’arrêt de l’activité seront probablement reportées à la rentrée sous réserve que ce maudit virus veuille bien nous fiche la paix. Économiquement, Défonce de rire traverse la crise sans trop de casse. Le théâtre fonctionne bien, avec une trésorerie saine. « Une fermeture comme ça coûte extrêmement cher. Ça se compte en dizaines de milliers d’euros de perte. Il y a le théâtre, les charges de la structure, on a des locaux à côté, des bureaux, des appartements pour loger les comédiens, il y a beaucoup de frais qui courent, des prêts. Financièrement, on a été impactés. Globalement, pour nous, ça va. Au niveau national, le paysage est plus sombre. Mars et avril sont traditionnellement nos meilleurs mois dans l’année. Rouvrir l’été, c’est ce qu’il y a de pire pour nous, mais on le fera parce qu’il faut relancer la machine, si on peut le faire… J’ai peur que dans les six mois à venir, il y ait un paysage de la culture privée en France qui soit assez catastrophique. »
Inquiétude à La Baie des Singes
La Baie des Singes contient 230 places assises. Avec les normes gouvernementales, la jauge tombe à 80 places environ selon les calculs de Claire Rouet en charge des relations publiques et de la programmation. « Comme la Baie des Singes est équipé d’un comptoir en licence IV, on a opté pour une configuration café concert qui nous permet de mettre des tables avec des groupes de 10 personnes maximum autour. Et là, on tombe à 40 personnes maximum. C’est la formule la mieux adaptée qu’on ait pour l’instant. Ce n’est évidemment pas viable économiquement. » Malgré tout et sous certaines conditions, la Baie va quand même accueillir des équipes artistiques locales en répétition en juin et juillet. En espaçant chaque résidence de trois jours pour assainir et nettoyer. La Baie a aussi invité des artistes locaux à faire une proposition de représentation en public en mode show-case avec la formule café concert, des représentations gratuites pour le public et pour lesquelles ils s’engagent à jouer gratuitement. « On est atrocement précarisés. S’il n’y a pas un vrai retour à la normale en septembre, je ne sais pas combien de temps nous pourrons tenir. » La Baie des Singes est une association sous convention avec un certain nombre de collectivités (état, région, département, Clermont Métropole et Cournon). « Elles ont toutes été bienveillantes. Elles ont maintenu les subventions. On est bien accompagnés, ce qui nous permet sans doute de pouvoir tenir deux mois de plus. »
Petit théâtre de Vallières : probablement en septembre
Responsable du Petit Théâtre de Vallières, Jean-Claude Martin déclare en préambule que depuis le début de la crise : « on n’a reçu aucune directive de personne. Ni conseil, ni protocole sanitaire. Le seul soutien qu’on ait reçu est celui de spectateurs qui ont fait preuve de solidarité. » Dans l’immédiat, les conditions ne sont pas requises pour rouvrir le Petit Théâtre de Vallières. La jauge de 40 places devrait être réduite à 10 pour répondre aux normes. « Les conditions semblent vouloir s’améliorer, les contraintes vont s’alléger, ce qui nous permettrait de reprendre en septembre dans des conditions normales » projette Jean-Claude Martin. Toutes les activités annexes comme les résidences ont toutes été annulées. « On attend septembre avec impatience, mais avec confiance aussi. »
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