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Le stade de Colombes, cœur battant des JO. © Musée d’art et d’histoire, Colombes
Le stade de Colombes, cœur battant des JO. © Musée d’art et d’histoire, Colombes
Événement Histoire

JO de Paris 1924 : Citius. Altius. Fortius…

Ça y est ! Après que, le 13 septembre 2017, le Comité international olympique a décidé d’attribuer conjointement leur organisation à Paris en 2024, et Los Angeles en 2028, les JO s’ouvrent pour une quinzaine de jours de communion sportive, médiatique et – espérons-le – populaire…

Dix mille cinq cents athlètes y participent, en provenance de 206 Comités nationaux olympiques qui se substituent aux États pour recevoir les invitations du Comité international olympique, le CIO. Guerre en Ukraine oblige, les CNO de la Russie et de son alliée, la Biélorussie, ne sont pas officiellement conviés, de même que celui du Guatemala, en querelle interne.

En 1924, les Jeux d’été, qui font suite aux premiers Jeux d’hiver de Chamonix 1 , inaugurent leur devise, Citius. Altius. Fortius (Plus vite. Plus haut. Plus fort), et s’échelonnent sur douze semaines, du 4 mai au 27 juillet 2 . Ils accueillent quarante-quatre CNO 3 et 3 089 athlètes, dont 299 Français plus dix-neuf Françaises, n’en déplaise à Pierre de Coubertin, allergique au sexe faible rendu, selon lui, disgracieux par trop de muscles ! Au classement des récompenses, la France se classe troisième avec trente-huit médailles, derrière la Finlande (trente-sept mais une d’or supplémentaire) et les intouchables États-Unis, 99.
Épicentre des 126 épreuves au programme, le stade de Colombes, construit pour l’occasion, offre 60 000 places et quarante vestiaires, équipés de douches d’eau chaude et de la fée Électricité. Par ailleurs, apparaît un village olympique constitué de baraques en bois alignées sur un terrain de Colombes, mis à disposition par le Racing Club de France. Il abrite un bureau de poste, un restaurant et une librairie rappelant que P. de Coubertin, désireux d’inclure des concours d’art à ses JO, avait été « champion olympique » de littérature, en 1912 à Stockholm, grâce à son ouvrage, Ode au sport, écrit sous deux pseudonymes.

Les baraques du premier village olympique. © Musée d’art et d’histoire, Colombes
Les baraques du premier village olympique. © Musée d’art et d’histoire, Colombes

JO 1924 : arrêts sur compétitions

En mai, le tournoi de rugby se dispute entre la France, la Roumanie et les États-Unis. Le 18 mai, la finale oppose une équipe de malabars yankees, plus initiés aux règles du football américain qu’à celles du rugby, à un XV de France aguerri mais sèchement battu, 3-17, au cours d’un match émaillé, sur le terrain
comme dans les tribunes, de noms d’oiseaux, de généreux marrons et de pugilats gratinés ! Jugé responsable de ce chaos, le rugby disparaît des JO jusqu’en 2016, à Rio, dans sa version à 7 ; les Fidji décrochent l’or.

Un gros plaquage sur l’ailier, Adolphe Jauréguy. © Le Miroir des Sports, 22 mai 1924
Un gros plaquage sur l’ailier, Adolphe Jauréguy. © Le Miroir des Sports, 22 mai 1924

Dernière apparition également – en attendant les Jeux de Séoul, en 1988 – pour le tennis qui donne à la France l’argent de sa seule médaille féminine, remportée en simple par Julie « Diddie » Vlasto, dont le gymnase parisien du passage Delessert (X e arr.) porte le nom. Chez les hommes, le « Mousquetaire » fameux, Henri Cochet, rafle l’argent en simple et en double tandis qu’un rescapé du naufrage du Titanic, Richard Norris Williams, devient champion olympique du double mixte.
En athlétisme, les sauts en hauteur de Harold Osborne (USA) font sensation car, au lieu de franchir les barres ventralement, il les passe sur le dos jusqu’à 1,98 mètre et l’or. Ingratitude de l’histoire, en 1968 à Mexico, c’est son compatriote Dick Fosbury, champion olympique avec 2,24 mètres, qui a donné son nom, le Fosbury-flop, à cette technique adoptée depuis par tous les sauteurs. En 1924, le héros français de la compète s’appelle Pierre Lewden, médaillé de bronze du haut de son 1,68 mètre.
Autre saut, la longueur, dont le concours est remporté par William DeHart Hubbard (USA), premier champion olympique noir de l’histoire.

Le smash autoritaire de M lle Vlasto.
Col.privée / H. Osborne, l’inventeur du Fosbury-flop.
© Le Miroir des sports illustré, 12 juillet 1924 / P. Lewden, la détente d’un grand.
© BnF
Le smash autoritaire de M lle Vlasto. Col.privée / H. Osborne, l’inventeur du Fosbury-flop. © Le Miroir des sports illustré, 12 juillet 1924 / P. Lewden, la détente d’un grand. © BnF

Des stars dans les étoiles

Indiscutablement, les « Finlandais volants » dominent outrageusement les courses de fond et demi-fond en thésaurisant beaucoup d’or. Ainsi, Paavo Nurmi et Ville Ritola montent cinq et quatre fois sur la plus haute marche du podium.
Dans le bassin de la piscine des Tourelles, le futur Tarzan hollywoodien, Johnny Weissmuller, grand collectionneur de records mondiaux qui n’a jamais perdu une seule course en compétition et fut notamment le premier à descendre sous la minute aux 100 mètres nage libre, décroche trois titres, pimentés d’une médaille de bronze en water-polo 4 . Pourtant, pour participer aux JO, cet Austro-Hongrois (Roumain) de naissance avait dû emprunter les papiers d’identité de son frère, né aux USA et donc pas considéré comme « apatride ». Quelle belle revanche pour le petit garçon de neuf ans, frappé par la poliomyélite !
À Hollywood, l’acteur Weissmuller a sans doute croisé le dentiste de nombreuses stars, Clarence Houser, champion olympique du lancer du poids qu’il propulse à 14,99 mètres, quatre jours avant de lancer le disque à 46,15 mètres – record olympique – pour un doublé en or déjà réalisé aux JO inauguraux de 1896 et jamais depuis…

Côté tricolore, Roger Ducret, la fine lame de l’escrime, « cet exercice intelligent » 5 , glane cinq médailles dans les trois disciplines (fleuret, épée et sabre), tant en individuel que par équipes, dont trois d’or qui lui valent d’être élevé au rang de « gloire du sport ». En haltérophilie, « l’homme le plus fort du monde », Charles Rigoulot, se joue de la fonte, même à l’arraché d’un bras qui fait sa dernière apparition aux Jeux. Il devient donc champion olympique des poids mi-lourds avec 502,5 kg soulevés en cinq mouvements. Juste après sa consécration olympique, il passe chez les lourds, bat tous les records mondiaux avant de remporter le Bol d’or automobile 1937 et de se lancer dans le catch puis le cinéma avec son ami, Bourvil.

Hubbard, pour l’histoire.
© Musée national du sport, Nice / Houser ne rime pas avec looser !
© Le Miroir des sports illustré, 12 juillet 1924 / P. Nurmi sur le cross-country individuel.
© Agence Rol-BnF
Hubbard, pour l’histoire. © Musée national du sport, Nice / Houser ne rime pas avec looser ! © Le Miroir des sports illustré, 12 juillet 1924 / P. Nurmi sur le cross-country individuel. © Agence Rol-BnF

Pour la cérémonie de clôture, germe une idée promise à un avenir toujours d’actualité : hisser les drapeaux du CIO, du pays hôte et du prochain à recevoir les Jeux, en l’occurrence celui des Pays-Bas pour Amsterdam 1928.
Enfin, grâce à la récente trouvaille de la T.S.F, les épreuves sont commentées en direct, sur la toute jeune station, Radio-Paris, par Edmond Dehorter, le père du radio-reportage.
C’est certain, avec ses 625 000 spectateurs et quelque 1 000 journalistes présents, Paris 1924 consacre les JO comme un incontournable rendez-vous planétaire…
Vive Paris 2024 !

L’élégance de R. Ducret...
© Agence Rol-BnF
Et la force de Ch. Rigoulot.
© M. Coudert, 1924, coll. privée - D.R. / E. Dehorter, surnommé « le parleur inconnu ».
© Agence Rol-BnF
L’élégance de R. Ducret… © Agence Rol-BnF Et la force de Ch. Rigoulot. © M. Coudert, 1924, coll. privée – D.R. / E. Dehorter, surnommé « le parleur inconnu ». © Agence Rol-BnF

1 Alors appelés « Semaine Internationale des Sports d’Hiver de Chamonix-Mont-Blanc ».
2 L’inauguration officielle a lieu le 5 juillet, en présence du président Gaston Doumergue.
3 Celui de l’Allemagne est indésirable, celui de l’Irlande invité pour la première fois.
4 Facilitée par sa manière de nager le crawl, sans mettre la tête sous l’eau.

À propos de l'auteur

Anne-Sophie Simonet

Historienne de formation universitaire, Anne-Sophie Simonet arpente depuis des décennies le « petit monde » clermontois de la presse. Auteur d'une dizaine d'ouvrages, c'est en tant que président de l'association Les Amis du vieux Clermont qu'elle invite à cheminer dans sa ville natale, la plume en bandoulière.

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