Mahsa Amini se promenait aux côtés de son père et de sa mère dans les rues de Téhéran. C’était une chaude journée de septembre, de celles que l’on a envie de croquer à pleines dents. La jeune femme de 22 ans portait la mort sur sa tête, sans s’en douter évidemment. Dans l’Iran des mollah, on ne badine pas avec le voile… le sien était simplement mal ajusté. Une infamie aux yeux de la police des mœurs qui l’arrêta, la frappa et la battit jusqu’au dernier signe de vie. Drame ordinaire au pays des fous de Dieu.
Pourtant, ce 16 septembre 2022, une onde de choc traversa le pays. Diffusée par les réseaux sociaux, seul contre-pouvoir face à la tyrannie religieuse, la nouvelle déchaîna la colère, les frustrations. Le début d’un mouvement spontané. Par milliers, les femmes, lasses d’être brimées, bridées, réduites, enfermées, enlevèrent leurs voiles et descendirent dans la rue, bientôt rejointes par une partie de la jeunesse.
Sous l’étau
La suite, on la connaît. Jouant sa survie, le régime réprima, tapa, emprisonna, exécuta à tire-larigot. Comme il sait si bien le faire depuis le 11 février 1979 et l’avènement de la République Islamique. Plutôt que d’écouter la rue, ne serait-ce qu’un peu, la loi sur le port du voile fut encore durci. « Que signifierait la République Islamique s’il n’y avait pas de hidjab dans le pays ? » avait prévenu Mohammed Dehgan, vice-président chargé des affaires juridiques.
Pas concernées
Deux ans jour pour jour après le décès de Mahsa Amini, originaire de la minorité kurde opprimée, quelques centaines de manifestants seulement (700 selon la préfecture, 5000 pour les organisateurs) se sont rassemblés à Paris, de la place Victor-Hugo jusqu’au Trocadéro, en scandant : « Femme, vie, liberté ». Diaspora iranienne, rares personnalités politiques et individus lambdas, ont apporté leur soutien à une population muselée et violentée.
Dans cette assemblée composite, une absence troublante et criante : celle des associations féministes (à l’exception du collectif Femen) et des structures droit-de-l’hommistes en général, pourtant si réactives sur d’autres terrains et si promptes à mener des combats moins risquées.
Indifférence ? Aveuglement ? Sectarisme ? Complaisance ? Parti-pris ? Lâcheté ? Une certitude : les sœurs de Mahsa Amini qui luttent, au péril de leur vie, pour leur dignité sinon leur liberté, ne leur devront rien si- un beau jour- le voile se lève sur l’Iran.
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