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Béatrice Diarra / Photo DR
Culture

Béatrice Diarra : roman «vague à l’âme»

« Pas de vague », premier roman de Béatrice Diarra est une plongée dans le quotidien d’une enseignante de Français qui officie dans un collège de zone dite sensible. Avec beaucoup d’humour et un franc-parler salutaire, l’auteure, elle même professeure dans les quartiers nord de Clermont, présente une vision de son métier et de la mixité, bien éloignée des clichés habituels.

Gülsen, Selma, Mohamed, Bilel, Esra, Osman, Angela…sont élèves dans un collège des « quartiers nord» ; ils ont pour professeur de Français madame Dakouo. A travers le récit quotidien de cette enseignante durant l’année scolaire 2014/2015, l’année des attentats de Charlie Hebdo et de l’Hyper Casher, le lecteur se retrouve en immersion dans une micro société composée d’adolescents aux origines diverses et aux vies antérieures plus ou moins mouvementées. Par le biais de grands classiques et d’œuvres littéraires, l’enseignante s’attelle à leur donner la maîtrise du français, cette langue qu’ils malmènent parce qu’elle n’est pas leur langue d’origine ou parce que dans leur entourage personnel, on ne parle pas d’une façon très académique. Abstraction faite de l’orthographe, des conjugaisons et d’un langage parfois fleuri, les textes sont prétextes à échanges sur la société et les relations humaines. Le challenge de madame Dakouo est permanent. Comment faire passer au mieux les règles en vigueur dans la société dont ses élèves sont majoritairement exclus ? Respect, laïcité, égalité hommes/femmes, émancipation…les dialogues, souvent cocasses, en disent long sur la fragmentation des idées et des modes de vies dans les fameuses zones sensibles. Au fil du récit, le lecteur finit par intégrer que derrière chaque « racaille » ou élève introverti, il reste l’espoir d’une meilleure intégration et d’une vie future plus ou moins réussie. Ce roman pose réellement la question de l’égalité des chances dans les zones sensibles, hélas trop souvent antichambres des tribunaux et cadre de vie pour des familles où le mariage forcé reste une règle.

Madame Dakouo, enseignante mais aussi mère de famille

Madame Dakouo, comme beaucoup de femmes, entame une seconde journée de travail lorsqu’elle rentre chez-elle. Mère de famille élevant seule ses deux enfants, elle se retrouve, encore, face à des problèmes d’éducation. Elle doit composer avec un fils passionné de musique mais en décrochage scolaire et une fille victime de ses mauvaises fréquentations. Malgré tout, ce sont ses enfants, alors elle passe souvent l’éponge et prend leur défense comme le font les mères de ses élèves avec des arguments plus ou moins recevables et parfois un peu de mauvaise foi. Sans jamais rompre le dialogue, elle prend soin de les écouter car ils lui donnent les clés de compréhension d’une société dans laquelle les quarantenaires sont souvent décalés et les cinquantenaires déjà désabusés.

Surtout pas de vague

Le nom du roman évoque ce que les enseignants entendent fréquemment au sein des établissements : le fameux « pas de vague » destiné à stopper tout mouvement qui pourrait être contraire à un ordre établi, défendu coûte que coûte par la Hiérarchie. Pour illustrer ce mode de fonctionnement, l’auteure dresse une galerie de portraits d’individus plus soucieux de leur avancement que des résultats pédagogiques. Une directrice surnommée Reine Margot en total décalage, MC son « béni-oui-oui » d’adjoint prêt à tout moment à basculer du côté obscur, un recteur mieux accueilli qu’un ministre, une tripotée de conseillers qui réinventent la roue tous les deux ans… Si cette brochette de branquignols apporte beaucoup de légèreté au roman, elle illustre cependant l’incapacité chronique de l’institution à évoluer, à écouter les retours d’expérience, à accompagner une communauté qui n’évolue pas au même rythme qu’elle.

Béatrice Diarra
Pas de vague, comment toucher la zone sensible ?
éditions L’harmattan, collection Rue des écoles / Littérature.

Rencontre-dédicace le vendredi 13 novembre à la Librairie Les Volcans

À propos de l'auteur

Olivier Perrot

Pionnier de la Radio Libre en 1981, Olivier Perrot a été animateur et journaliste notamment sur le réseau Europe 2 avant de devenir responsable communication et événements à la Fnac. Président de Kanti sas, spécialisée dans la communication culturelle, il a décidé de se réinvestir dans l'univers des médias en participant à la création de 7jours à Clermont.

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