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Monument aux morts, place Salford. Photo : Roman Cassanas/ Meow
Vie publique

11 novembre : les combats perdus de la mémoire

Un siècle et deux ans, un autre conflit mondial et pas mal d’événements nous séparent du 11 novembre 1918. Dans la France craintive de 2020, il n’est pas inopportun de se souvenir de la génération sacrifiée de la « Grande Guerre ». Même si la mémoire vacille…

Combien de temps commémore-t-on une date-anniversaire ? Combien d’années ou de siècles faut-il pour que la mémoire s’efface suffisamment et que les événements d’hier glissent vers l’oubli, selon une loi inexorable ?  Les livres d’histoire, en effet, ne cessent de s’enrichir de nouveaux chapitres, réduisant parallèlement l’espace consacré aux précédents. De ci, de là, se manifestent quelques voix pour réclamer la fusion des dates anniversaires des deux guerres mondiales en une seule et même journée commémorative . Cette requête provient généralement de milieux patronaux, excédés par l’abondance (toute relative) de jours fériés au calendrier. Et on sait l’état «macronique» à l’écoute des lobbies économiques même lorsqu’il vit dans l’obsession sanitaire…

Les stigmates de terribles affrontements

Que reste-t-il aujourd’hui du 11 novembre 1918 ? Les derniers poilus ont disparu, rejoignant, longtemps après, leurs frères d’armes dans l’au-delà. Du coup, leur « mémoire » se concentre dans les livres, des récits, des lettres conservées ou des images en noir et blanc dont on ignore, le plus souvent, si elles sont véridiques ou trafiquées… Dans l’est de la France, les paysages gardent parfois les stigmates des terribles affrontements et les cimetières militaires témoignent aussi de l’horreur et de l’intensité des combats. Surtout, il n’est pas une ville et même un village qui n’abrite un monument aux morts, portant les noms des « fils » disparus sur les champs de bataille.

La génération sacrifiée

En novembre 1918, à Clermont-Ferrand comme dans toute la France, la liesse éclate. On en termine, enfin, avec quatre abominables années… L’enthousiasme ressemble, peu ou prou, à celui apparu aux premiers jours de la guerre lorsque les soldats partaient sûrs d’une victoire-rapide et totale, une « victoire-éclair ». Les festivités se prolongent durant quelques jours avec pour point d’orgue le dimanche 24 novembre. Bientôt des rues seront débaptisées pour recevoir des noms de pays alliés  (avenue de Grande-Bretagne et d’Italie, rue de Serbie) ou bien d’hommes  « glorieux », tel Georges Clemenceau. Mais il manque du monde, beaucoup de monde pour fêter la paix plus encore que la victoire. Les victimes sont innombrables, les familles souvent touchées. C’est presque une génération d’hommes qui est sacrifiée.

Un matin en 2020

Ce matin, rue du 11 Novembre (ex rue Neuve), qui fut l’une des plus commerçantes de Clermont. Dans la ville confinée, un couple masqué, à la recherche d’un peu de vie, se tient par la main, un gamin court derrière des pigeons, un jogger file jusqu’à l’angle de la place Gaillard …quant au kiosque à journaux, il n’est plus qu’un kiosque sans journaux, c’est à dire inutile. Il faudra aller chercher ailleurs les derniers magazines titrant sur les dangers de l’islam radical ou l’espoir suscité par un possible vaccin. Le temps passe, comme un rouleau compresseur, sans trop regarder derrière lui.

À propos de l'auteur

Marc François

A débuté le métier de journaliste parallèlement sur une radio libre et en presse écrite dans les années 80. Correspondant de plusieurs médias nationaux, rédacteur en chef de l’hebdomadaire Info Magazine (Clermont, Limoges, Allier) pendant 9 ans, il a présidé le Club de la Presse Clermont-Auvergne entre 2009 et 2013. Il est l’initiateur de 7 Jours à Clermont.

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