Nature est l’une des plus anciennes et des plus incontournables revues scientifiques au monde. Parmi ses publications marquantes, la découverte de l’électron (1897), la preuve de la tectonique des plaques (1966), la mise en évidence du trou de la couche d’ozone (1985) ou le clonage de la brebis Dolly (1996). Pour tout chercheur, un article dans Nature, c’est un peu le graal… La PME Carbios, basée à Saint-Beauzire, a fait encore mieux en décrochant la grande “une” du 9 avril 2020. Excusez du peu.
“Éliminer le goulot d’étranglement”
Sur la photo de couverture – signée Randy Olson du National Geographic – une personne est plongée au milieu d’un amoncellement de bouteilles en plastique. Ce plastique, c’est le PET, un des polymères les plus courants du marché. Il est aussi utilisé pour fabriquer des fibres textiles, des emballages alimentaires, des composants thermotransformés… Bref, il est partout, y compris dans nos océans, nos forêts, nos jardins et le long de nos routes. Quelque 70 millions de tonnes sont produites annuellement ! Le titre de la revue, « Clearing the bottleneck” (“éliminer le goulot d’étranglement”) traduit l’ambition de Carbios pour venir à bout de ces déchets et préserver durablement notre planète.
Une enzyme “gloutonne”
Concrètement, ce spécialiste de la chimie verte a développé une enzyme “gloutonne” capable de décomposer ce polluant et de le recycler à l’infini. En clair, de faire du neuf avec du vieux, comme pour le verre. Alain Marty, directeur scientifique de Carbios, se dit “très fier” que Nature ait “validé” la qualité de ses recherches. Même son de cloche pour Sophie Duquesne, chargée de recherche à l’INRAE : “voir ses travaux reconnus par la prestigieuse revue “Nature” est une consécration. Aussi je suis très fière du travail accompli par les chercheurs.”
Prochaine étape : un test en 2021
“Cette innovation est une véritable avancée pour le recyclage et la production de PET. Grâce à la technologie novatrice développée par Carbios, l’industrie du PET deviendra vraiment circulaire. C’est une attente majeure de tous les acteurs de cette industrie et plus largement la société civile dans son ensemble” se félicite Saleh Jabarin, professeur émérite à l’Université de Toledo (Ohio, USA) et membre du conseil scientifique de Carbios, associé au laboratoire Toulouse Biotechnology Institute sur ce projet.
Bien sûr, le travail est loin d’être fini… En 2021, Carbios testera son procédé au sein d’un “démonstrateur” implanté au cœur de la vallée de la chimie lyonnaise, ouvrant la voie à une future industrialisation. Les géants du secteur (L’Oréal, Pepsico, Nestlé Waters, Orangina Schweppes, Michelin…), très intéressés par cette innovation, sont associés à des degrés divers au projet.
“Carbios est la première société au monde à marier ainsi avec succès les deux sciences que sont l’enzymologie et la plasturgie” conclut Philippe Pouletty, directeur général de Truffle Capital, qui a créé Carbios en 2011. Bien sûr, il faudra encore quelques années avant que cette solution ne soit déployée à grande échelle. Mais cette découverte est incontestablement une excellente nouvelle pour la nature…
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