Lors de la campagne présidentielle de 1974, le candidat René Dumont que l’on prenait à l’époque pour un doux dingue écolo, l’avait prédit : un jour, l’eau viendra à manquer. 40 ans plus tard l’échéance semble si proche que les institutions commencent à s’inquiéter sérieusement. Les mesures de restrictions sont de plus en plus fréquentes et prises de plus en plus tôt dans le calendrier. L’évolution climatique est bel et bien devenue réalité, générant des périodes de sècheresse comme celles vécues en 2022 et au début de 2023. Si globalement la quantité d’eau de pluie reste équivalente d’une année sur l’autre, les réserves ne se reconstituent pas pour autant. En effet, lorsque la pluie tombe en abondance au printemps, l’eau s’évapore rapidement et elle est captée par la végétation. Et lorsqu’elle tombe en très grande quantité sur un sol sec ou imperméabilisé par l’action humaine, elle ruisselle emportant tout sur son passage sans atteindre les nappes phréatiques. Après un hiver 22/23 malheureusement assez sec, mais un printemps pluvieux, la situation actuelle n’est pas catastrophique mais certaines réserves atteignent les limites. C’est le cas du lac de Naussac qui alimente une grande partie de la région, plein à seulement 49% en ce début d’été car il lui faut près de deux ans pour se remplir quand les conditions sont favorables.
Changement culturel nécessaire vis à vis de l’eau
Le XXe siècle a apporté le confort de l’eau courante. Mais avec un prix très bas et un relative abondance dans certains pays, son utilisation s’est faite sans compter et dans une totale insouciance. « Sur l’ensemble du département, on entre dans la période où il va faire plus chaud et plus sec donc il faut que l’on soit tous responsables dans l’utilisation de l’eau » annonce Guillaume Brun, directeur départemental des territoires, le service de l’État qui s’occupe de l’eau dans les départements. « les arrêtés sont un moyen de faire prendre conscience qu’il faut changer notre rapport à l’eau. L’idéal serait que l’on ait pas à en prendre parce que tout le monde aurait conscience qui faut effectuer les bons gestes. » Pour atteindre le changement culturel vis à vis de l’eau, l’État a initié un plan en trois volets : Sobriété pour tout le monde y compris les industriels, disponibilité de la ressource avec un gros travail sur les réseaux qui peuvent parfois être fuyards et enfin qualité, avec lutte contre les pollutions et désartificialisation des sols.
« On ne peut pas vivre comme on a vécu depuis 20 ans »
« Le territoire est vaste et disparate. Il y a des zones où il y a beaucoup d’eau, la Chaîne des Puys et le Cézalier, 56% et puis la nappe alluviale 30%, là où se situent souvent les difficultés » explique Pierre Riol, vice président du Puy-de-Dôme en charge de l’environnement. Si le département n’a pas de compétence sur la question de l’eau, les élus souhaitent qu’il puisse agir comme un facilitateur « Le département souhaite initier un partage de l’eau. L’eau n’appartient à personne, elle n’a pas de limites territoriales et pour la partager, il faut des interconnexions parce que c’est le seul moyen de partager la ressource entre tous. Le département investit de manière importante avec 45 millions d’euros fléchés pour les 7 prochaines années. « Mais il faut aussi parler plan de sobriété. Tous les citoyens doivent faire des écogestes. On ne peut pas vivre comme on a vécu depuis 20 ans. Personne n’ignore le réchauffement climatique et maintenant, il va falloir préserver cette eau » reprend Pierre Riol qui évoque également les mondes industriels et ruraux. Pour l’industrie, la CCI mène une étude en particulier sur certains process qui peuvent générer des économies d’eau, alors que le monde agricole cherche à mettre en œuvre des plans d’exploitations moins gourmands.
La métropole prend aussi sa part
De son côté la métropole clermontoise à mis en place un plan à plusieurs étages. « 220 millions sont investis sur le mandat 2020/2026 avec l’objectif d’améliorer le rendement dans les réseaux, améliorer le traitements des eaux usées et gérer les milieux naturels pour avoir des cours d’eau plus propres sur le territoire » précise Christophe Vial, vice président de la métropole en charge du cycle de l’eau. « Nous travaillons également sur les documents d’urbanisme. Le nouveau PLUi prévoit l’infiltration à la parcelle obligatoire et le raccordement au réseau collectif dérogatoire de manière à éviter les transferts importants. Il y a ensuite un plan de sobriété sur les bâtiments de la métropole, sur les piscines que l’on vidange moins, sur l’arrosage des stades dont on mesure l’humidité des sols pour ne pas arroser plus que nécessaire. Nous avons revu le nettoyage des véhicules de la métropole, changé le type de plantations et nous poussons une réflexions sur la réutilisations des eaux usées traitées pour par exemple le nettoyage de la voirie. » Depuis 2017 la métropole décline des plans communs pour l’ensemble des communes qui présentent des disparités au niveau des ressources en eau mais aussi de l’état des réseaux. Aujourd’hui l’ensemble du réseau affiche un rendement de 80% et la métropole dans un geste solidaire pour les communes va s’employer à réparer les fuites. « Aujourd’hui l’approvisionnement en eau provient à 60% de la nappe de l’Allier et 40% de la Chaîne des Puys. Le plan crise écrit par les services permet d’envisager de transférer plus d’eau de la Chaîne des Puys sur le bas de la métropole, mais si il y avait une rupture totale sur Naussac, il est clair que nous ne pourrions plus alimenter l’ensemble du territoire métropolitain et serions obligés de mettre en place des secteurs prioritaires » conclut Christophe Vial.
Commenter