L’avantage avec le rugby, c’est qu’il n’est point besoin de s’accrocher aux vertigineuses 336 pages de la Gallimardise de l’année pour plonger dans des intrigues nébuleuses. La rigueur n’étant pas la vertu cardinale des français, plutôt portés vers la légèreté de l’être.
Bulles de savon
On ne sait pas si Moravia faisait partie de l’armada du XV de France lors du ‘’Voyage à Rome’’ mais c’est sans états d’âme que les Bleus ouvraient le Tournoi des 6 Nations en passant 50 points aux transalpins.
Large victoire suivie d’un probant succès en terre irlandaise qui, sans préjuger de la suite, venait souligner l’embellie d’un coq redressé sur ses ergots depuis la prise en main de la basse-cour par Fabien Galthié.
Jusqu’alors, la bulle anti-Covid dressée autour de notre XV hexagonal semblait avoir fonctionné à merveille. Et puis patatras, voilà que les sélections tricolores prennent la gaufre : du Rugby à 7 jusqu’aux moins de 20 ans en passant par les filles, c’est la contamination généralisée.
En puisque gaufre il y a, on apprenait que quelques joueurs avaient été vus dégustant d’appétissantes ‘’cialde’’ dans les rues de Rome où, a priori, ils n’avaient rien à faire.
La bulle aurait bien pu aussi faire ‘’pschitt’’ (citron bien sûr) huit jours plus tard à Dublin lorsque Galthié démasqué embrassait ses joueurs à tout va…24 heures avant d’être déclaré positif.
Anomalies ? Vous avez dit anomalies ?
A l’approche du match contre l’Ecosse, 16 cas de Covid étaient donc avérés au sein du XV de France. Mais les règlements s’adaptent lorsque les droits TV l’imposent : Show must go on. Ce qui à l’automne valut forfait aux Fidjiens vaut maintenant un report de match à fin mars au grand dam des anglo-saxons sous le coup de l’incompréhension.
Comment et pourquoi le principe de la bulle sanitaire qui avait permis l’organisation sans encombre du ‘’final 8’’ de la Ligue des Champions l’été dernier à Lisbonne ou plus récemment de l’Open de tennis d’Australie à Melbourne s’est-il révélé inefficace dans le petit monde de l’Ovalie gauloise ?
L’enquête interne de la FFR concluant vite fait (bien fait ?) à un zéro faute, pas question de demander au réfèrent Covid ou au président de la fédé de prendre la porte (ha, ha, ha !). Une opération blanchiment qui arrange bien aussi le ministère probablement peu enclin à se lancer dans une embrouille politico-sportive. Circulez, y a rien à voir !
La FFR allait néanmoins désigner un cadre chargé de marquer les bleus à la culotte pour ‘’faire respecter l’application stricte d’un protocole sanitaire renforcé’’. Ce qui, en creux, laisse à penser que les bulles étaient plus de savon que de béton. Anomalies sûrement.
Sur nos terres puydômoises, l’actualité ovalienne n’a pas manqué de susciter, notamment chez les supporters de l’ASM, un autre type d’incompréhension.
Désertions en jaune et bleu
Outre le parcours sportif sinusoïdal des ‘’jaune et bleu’’ et un épisode pandémique auquel peu de clubs ont échappé depuis le début de saison, une première interrogation a concerné la dérobade du seconde ligne australien Timani annonçant fin janvier qu’il faisait ses valises pour motif personnel à 18 mois du terme de son contrat. Retour au pays acté mi-février.
Le club eut beau envelopper le préjudice sur le thème « le cœur a ses raisons, etc… », il n’en restait pas moins que cette désertion inexpliquée devenait un boulet de plus à trainer dans le contexte que l’on connait.
Les obligations contractuelles seraient-elles donc unilatérales au pays des Bisounours ?
Une interrogation qui revenait dans les conversations avec encore plus d’acuité trois semaines plus tard quand Franck Azéma, sous contrat jusqu’en 2023, annonçait lui aussi son envie de respirer un air nouveau alors même qu’à l’automne le staff avait annoncé sa volonté de changer le jeu de l’ASM en le rendant « plus imprévisible », impliquant une phase de reconstruction.
Devant l’incompréhension générale, l’entraineur en chef de l’ASM arguait d’un « souci d’honnêteté vis-à-vis du club» craignant « que la routine s’installe »… et peut-être de ne plus avoir ce qu’il est convenu d’appeler l’oreille du vestiaire.
N’était-ce pas l’aveu que le ver était déjà dans le fruit ?
Qui veut payer un million ?
Dés la mi-septembre à Bayonne, Azéma avait dégoupillé dans le vestiaire après que ses troupes eussent tristement abandonné la victoire aux Basques. Les cinq défaites concédées ensuite au Michelin, la plupart sur des fins de matchs abracadabrantesques, auront sans doute pesé lourd dans la tête du Catalan quand il évoque une « certaine lassitude » et l’envie de changer d’atmosphère.
Il est vrai qu’embaucher tous les jours ou presque à 5h30 du mat (est-ce nécessaire ?) en restant continuellement sous pression peut engendrer de l’usure.
Le ‘’casus belli’’ n’entrant pas dans l’ADN des dirigeants montferrandais, il eut été surprenant qu’à l’incompréhension des supporters puisse succéder un ostensible courroux de la direction du club.
Les anomalies n’auront décidemment pas épargné le président Jean-Michel Guillon qui n’en pense probablement pas moins mais ne peut que faire le dos rond face à cette sorte de désertion non sans conséquences, sportivement et financièrement.
Logiquement, les contrats ça se rachète. Qui donc payera le million d’Euros des deux années que Franck Azéma ne va pas honorer ? Quel sera le devenir des autres membres du staff ?
Et surtout, qui prendra la barre du vaisseau amiral clermontois ?
Par ailleurs, on aurait pu s’interroger aussi sur le sabordage des divers championnats fédéraux et sur le tsunami viral venu soudainement accabler un Clermont Foot en pleine euphorie. Le virus aurait-il sauté sur la table du vestiaire au soir de la victoire sur Valenciennes ?
Dernière question : l’incompréhension est-elle vraiment une chose aussi admirable que le prétend le Goncourt de l’année ?
(1) L’anomalie (Gallimard)
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