Entre 800 000 et 1 000 000. C’est, selon la sénatrice de Saône-et-Loire Marie Mercier, le nombre d’élèves qui subiraient du harcèlement scolaire en France. Cela représente entre 6% et 10% des effectifs. Un chiffre loin d’être négligeable, qui passe pourtant bien souvent sous les radars. Et le Puy-de-Dôme ne fait pas exception. Quand Eve Coquart, artiste lyrique souhaite organiser avec les Voix Solidaires « un grand concert contre le harcèlement scolaire » dont les recettes seraient reversées à une association luttant contre ce phénomène, elle ne trouve pas d’interlocuteur sur le département. « J’ai été surprise d’apprendre que ça n’existait pas ici », se rappelle-t-elle. Mais à force de recherche, elle finit par entendre parler de Sandra.
Près de dix ans de lutte contre le harcèlement
Âgée de 50 ans, la secrétaire parcourt les routes du Puy-de-Dôme « depuis près de dix ans » pour organiser des ateliers de sensibilisation contre le harcèlement dans les établissements scolaires. »L’histoire commence en 2015″, rembobine Sandra. À l’époque, le pays entier est traumatisé par les attentats de Charlie Hebdo et le gouvernement appelle « les citoyens qui voudraient faire des interventions dans le système scolaire sur des sujets qui les intéressent » à rejoindre la réserve citoyenne.
Sandra, « déjà engagée au sein de sa commune », saute le pas et choisit d’aborder, notamment, le harcèlement scolaire. Pourquoi ce sujet ? Tout simplement parce qu’il résonne avec son histoire personnelle. « Mon CV violences est très développée », lance celle qui explique ensuite en avoir subi aussi bien à l’école qu’à son domicile. « Je connais aussi l’autre côté du voile, parce que j’ai perdu mon meilleur ami quand j’avais 15 ans, et ça m’a fait devenir méchante à à mon tour. »
Comprendre le harcèlement
Ce parcours, il lui permet d’être plutôt bien placée pour connaître les meilleures ficelles à tirer dans ce genre de situations, pas toujours bien gérées par l’Éducation Nationale. En cause notamment, l’absence de volonté de se pencher sur les causes de ces violences. « Ils font changer les harceleurs d’établissement, mais ça ne suffit pas, et ils recommencent ailleurs. »
Sandra, de son côté, veut « aider les victimes, mais aussi les auteurs, comprendre pourquoi ils commettent ces actes », dans le but de les aider à en sortir. « Il y a toujours la même idée, leur faire comprendre qu’ils ne sont pas seuls ! » Cela prend la forme de rendez-vous avec les enfants, « l’un, l’autre puis les deux en même temps. La plupart du temps, les choses se calment. » Mais aussi de prise de contact avec les parents, selon les situations.
Avec son passif, Sandra sait que ces comportements révèlent souvent un certain mal-être. « Il peut y avoir une famille harceleuse derrière un enfant harceleur, et ça devient vite compliqué. » Dans ces cas-là, Sandra prévient les autorités compétentes, mais ne va pas plus loin. « Il faut savoir connaître ses limites », souffle-t-elle. Cela ne veut pas dire pour autant qu’elle lâche l’affaire. « Ce sont tous mes petits, je ne les abandonne jamais. Je suis dans l’ombre et ils le savent. »
En plus de régler les conflits, Sandra s’occupe également d’organiser des ateliers. « J’encadre une dizaine de jeunes lycéens, et on va dans d’autres établissements » avec comme but de sensibiliser quant à cette thématique, aussi bien « les adultes que les enfants. »
Une association comme structure
Toute cette histoire, qui dure depuis une dizaine d’années, est parvenue aux oreilles d’Eve Coquart. Et la chanteuse lyrique est vite « impressionnée » par Sandra, « une femme incroyable. » Elle souhaite donc l’aider dans son combat via l’organisation du concert Voix Solidaires, qui allait servir à lever des fonds.

Problème, la secrétaire réalisait toutes ces actions sans vrai cadre et c’était donc impossible de lui verser des sommes d’argent. « Eve m’a poussé à lancer une association, et comme ça faisait quelques temps que d’autres personnes m’en parlaient, je me suis lancé. »
Il ne restait plus qu’à trouver d’autres volontaires prêts à l’accompagner dans cette aventure : Sophie, Alexis et Enola. Les deux derniers ont eux-mêmes subi du harcèlement dans leur jeunesse, et qui ont par la suite fait partie des « ambassadeurs » qui ont accompagné Sandra dans ses ateliers. « C’était important de mettre des jeunes en avant », glisse Sandra. Respectivement président et co-présidente, Alexis et Enola n’ont pas vraiment hésité avant de se lancer dans l’aventure.
Avec cette nouvelle association, appelée CVHS 63, Sandra (trésorière), Sophie (secrétaire), Alexis et Enola vont pouvoir passer à la vitesse supérieure. « Maintenant, on pourra nous-mêmes contacter les établissements pour leur proposer nos ateliers, ce qui va élargir nos champs d’action. »
Un partenariat avec une psychothérapeute
En plus de ça, la création de la CVHS va permettre de donner une nouvelle légitimité aux actions de Sandra, puisqu’avoir « une structure rassure beaucoup plus les gens. » Pour finir, grâce à cette toute nouvelle association, Sandra a pu créer un partenariat avec « une psychothérapeute, qui proposera des séances. » De quoi apporter des solutions différentes et plus adaptées pour continuer à « aller dans le bon sens. » Pour Sandra, la création de CVHS 63 c’est aussi le dénouement de tout un combat qui a guidé toute une vie. « Mes enfants sont fiers de moi, et ça me touche beaucoup parce que je n’ai pas eu beaucoup l’occasion qu’on me dise ça. »
Contact par mail sur stop.scolaireharcelement@gmail.com. Possibilité d’adhérer : 5 € pour les scolaires, 10 € pour les autres. Retrouvez Sandra sur Facebook et Instagram.
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