Une place de Jaude noyée de monde. Comme aux plus beaux jours des titres de l’ASM. Et un froid qui glaçait les os. Par milliers, ils s’étaient rassemblés, venant des quatre coins de la ville et de bien au-delà. Que dire face à l’effroi ? Sinon affirmer ses valeurs et son refus de céder… Que faire face à la douleur ? Sinon l’affronter et communier… Nous étions le 11 janvier d’un autre hiver. Il y a six ans… Ce jour là, le photographe et éditeur clermontois Francis Debaisieux se trouvait dans la foule, un parmi les 80.000 autres…mais muni d’un appareil photo et conscient de vivre une journée à nulle autre pareille.
Une rédaction décapitée
Quatre jours plus tôt, des terroristes, les frères Chérid et Saïd Kouachi avaient pénétré dans les locaux de l’hebdomadaire Charlie Hebdo, rue Nicolas-Appert à Paris pour assassiner douze personnes. Des membres de la rédaction de l’hebdomadaire, coupables aux yeux des meurtriers d’avoir publié des caricatures de Mahomet mais aussi un policier, un membre d’une société de maintenance et le Clermontois Michel Renaud que les hasards de l’existence (mais le hasard existe-t-il ?) avait mené jusque-là, par le biais du Rendez-vous du Carnet de voyage. » J‘ai été membre bénévole du Rendez-vous du Carnet de voyage pendant huit années. A l’origine, c’est Michel Renaud, alors président, qui m’avait accueilli. Sa mort m’a donc particulièrement ému. Je me devais, dès lors, d’être présent à cette grande manifestation. Et en tant que photographe, j’ai voulu aussi garder des traces de cette journée. A mes yeux, il s’agissait également d’une forme d’hommage à toutes les victimes de cet assassinat » explique aujourd’hui Francis Debaisieux.
Des images et une exposition
A Clermont, ce 10 janvier, la foule a inondé les rues, se déplaçant lentement vers l’avenue des Etats-Unis, puis la place Delille, pour rejoindre pas à pas, peu à peu, la place du 1er mai et le parvis de Polydôme où des gerbes ont été déposées. Michel Renaud, sans doute, était dans les esprits. Et au-delà, pour tous, l’horreur du terrorisme, du sang et de la barbarie la plus infâme… Une réaction digne face à un meurtre lâche. Quant aux photos saisies par Francis Debaisieux, tout au long de ce cortège douloureux, elles ont fait ensuite l’objet d’une exposition. « Anne-Sophie Simonet a écrit des textes en lien avec les images et nous avons structuré l’exposition ensemble. Elle a circulé pendant trois ans dans des collèges, des lycées et des écoles avec le concours de l’académie » précise le photographe.
Dix mois plus tard, dans la nuit du 13 novembre, ce serait l’horreur du Bataclan et les attaques simultanées perpétrées à Paris: 130 vies supprimées. Et le 14 juillet 2016, l’attentat de Nice et ses 86 morts. Depuis, la trop longue liste des victimes s’est poursuivie. Le 11 janvier 2015 paraît lointain, pourtant la menace rôde encore et toujours.
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