Dans le traitement contre le cancer, il y a eu différentes (r)évolutions. La radiothérapie, la chimiothérapie, l’hormonothérapie, l’immunothérapie… A chaque fois, ces modèles ont permis de nouvelles guérisons, suscitant beaucoup d’espoir chez les malades et leurs proches. Bonne nouvelle : une “arme thérapeutique” supplémentaire vient d’être déployée au CHU de Clermont-Ferrand.
Baptisée “CAR-T cells” (pour Chimeric Antigen Receptor T-Cells), cette approche consiste à prélever des cellules du système immunitaire du malade et à les “reprogrammer” génétiquement. Une fois réintroduites dans le corps, ces cellules reconnaissent la cible cancéreuse et la détruisent. Certes, il y a des effets secondaires. Mais a priori, l’efficacité est pérenne. Et une seule injection est nécessaire.
“Hier, nous envoyions les patients concernés dans d’autres CHU pour être traités. Aujourd’hui, nous pouvons les accompagner” se félicite le professeur Jacques-Olivier Bay, chef du service de thérapie cellulaire et d’hématologie clinique. L’ensemble de la procédure dure environ quatre semaine. Contrairement à l’allogreffe, il n’y a pas de problème de compatibilité.
20 patients par an
Chaque année, une vingtaine de patients atteints de leucémie aiguë lymphoblastique et de lymphomes agressifs bénéficieront de ce traitement. Il sera mis en oeuvre lorsque les autres méthodes n’auront pas donné de résultats probants ; élargissant ainsi l’espoir d’une guérison.
“Pour l’instant, nous n’avons que ces deux indications. Mais on peut imaginer que ce dispositif se développe dans d’autres maladies hématologique. Il existe aussi des essais sur le cancer du sein, le cancer de l’ovaire… Bref, sur les tumeurs solides. C’est en cours de développement. Enfin, dans un futur plus lointain, ce modèle pourrait être utilisé pour les maladies auto-immunes ou inflammatoires” s’enthousiasme le professeur Bay, qui n’hésite pas à parler de “révolution”.
Manifestement, la recherche sur le sujet est très prometteuse. En lien avec les deux laboratoires qui fabriquent le médicament (Novartis et Gilead), le CHU de Clermont-Ferrand pourra participer à des essais cliniques, offrant une accessibilité précoce du traitement à certains patients. “Cela va dépasser le domaine de la cancérologie et irradier dans d’autres stratégies thérapeutiques. On s’attache à des maladies, mais c’est un concept qui émerge. Le modèle est là” poursuit le chef de service.
320.000 euros le médicament
Si les premiers essais datent de 2014, l’établissement clermontois est le seul à proposer cette nouvelle approche dans le centre de la France. Le Centre Perrin ne la propose pas. Ni même les CHU de Saint-Etienne ou de Limoges… Les plus proches sont ceux de Lyon, Montpellier, Bordeaux, Poitiers, Paris ou Marseille.
“Nous nous positionnons parmi les meilleures équipes de France. C’est un projet des équipes soignante, médicale et administrative. La cancérologie est l’affaire de tous : des centres de lutte contre le cancer, mais aussi du CHU, car nous sommes en pointe sur ces domaines-là” assure le directeur général Didier Hoeltgen.
Le coût unitaire de ce médicament révolutionnaire oscille entre 320.000 et 340.000 euros. Pour pouvoir le proposer, le CHU a créé 3,5 emplois (229.000 euros de coût annuel) et investi dans 130.000 euros de matériel. Le patient, lui, ne déboursera pas un seul centime. C’est aussi le privilège d’habiter en France. “Nous ne sommes pas uniquement fondés sur la comptabilité et la rentabilité à court terme. Sinon, il n’y aurait plus d’hôpital public. C’est aussi la noblesse de notre métier” rappelle Didier Hoeltgen.
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