Ça avait démarré entre deux passionnés, M et E, autour d’un verre. Quelques semaines plus tard – on ne fait pas une association à deux – Pierrette, Daniel, Eric, Jean-Pierre et Michel décidaient d’une association de pur plaisir, de partage de ce goût inextinguible pour l’ailleurs.
Vite rejoints par d’autres adeptes de l’ailleurs, la volonté, un peu folle alors, de créer l’événement pour s’ouvrir au plus grand nombre naissait rapidement. La seule biennale annuelle ouvrait pour la première fois ses portes en 1999. Des premières années de pure passion, de pure volonté et à l’huile de coude. Passons sur ces années pionnières qui doivent beaucoup à la nostalgie.
L’association, ses membres, ses permanentes et ses responsables ont depuis construit bien plus et bien mieux. Un événement unique, dont l’ampleur et le succès font aujourd’hui de Clermont-Ferrand et de la métropole auvergnate La référence.
Trois jours en novembre d’intenses partages pour tous les goûts pérégrins. « Les Hommes aux semelles de vent » se retrouvent ainsi, dans la capitale auvergnate, dans un foisonnement d’échanges et de découverte, qui a su garder l’esprit de la rencontre malgré le succès.
Pourquoi le carnet de voyage
Il est bien normal, dans cette indéniable et formidable réussite qui doit beaucoup à ses soutiens[1] et qui doit tout à l’équipe de l’association, que l’on puisse prendre un temps de recul et s’interroger sur le sens même du carnet de voyage.
Oublions là les belles aquarelles. Il n’y a pas besoin d’être voyageur dans l’âme pour en produire. Revenons aux sources sans parler de pélerinage [2].
L’idée fondatrice de l’association était de partager, voire promouvoir, un « voyage autrement », juste et possible; le considérant alors, non seulement comme une translation physique dans l’ailleurs mais, surtout, comme une expérience personnelle du voyage.
« Lire, lire ne vaut rien, il faut aller voir » disait Ella Maillart, mais dans cette courte citation[3] c’est bien de rencontre et de confrontation à l’altérité dont il s’agit. Difficile dans un voyage organisé. Difficile si l’on ne s’ouvre pas à l’imprévu. Difficile si l’on ne force pas la rencontre.
Alors projetons-nous dans la gestuelle, elle est souvent essentielle dans l’échange.
Se poser, seul de préférence, dans un ailleurs (qui n’a pas obligatoirement besoin d’être à l’autre bout du monde), ouvrir un carnet, sortir un stylo ou un pinceau, écrire mais plus encore dessiner, c’est s’installer sans s’imposer, en silence. C’est forcer son regard, sans obliger celui de l’autre. C’est une gestuelle universelle (comme le disait Hugo Pratt, écrire et dessiner est un même geste), au-delà des barrières. C’est ainsi ouvrir la porte aux possibles.
C’est cela finalement le carnet, un outil qui en tout lieu permet sans doute plus facilement que d’autres l’échange et ouvre le regard.
Si le talent n’est pas l’essentiel, il peut être magnifique. Alors, ne boudons pas notre plaisir au Rendez Vous, en novembre[4]. On peut aussi admirer les talents.
N’hésitons pas à arpenter ses allées et à gravir ses étages pour rencontrer, public ou invités, des voyageurs dans toute leur diversité, et dans toutes leurs passions. Entre deux voyages, le monde sera là, pour trois journées de partage, pour trois journées d’envies et d’idées de prochains départs ; prendre alors son billet d’avion, son stylo et ses pinceaux et tenter son carnet.
[1] Et tout particulièrement la Ville de Clermont-Ferrand
[2] Allusion non voilée à « Pèlerinage aux sources » de Lanza del Vasto (1943), bible de la génération hippie et vrai livre de voyage
[3] Citation dont est tiré le nom de l’association, IFAV
[4] A Polydome, du 16 au 18 novembre 2018. https://www.rendezvous-carnetdevoyage.com/
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