7 Jours à Clermont : Jessy, un mot sur les deux derniers matchs des Bleues qui se soldent par 2 défaites ?
Jessy Trémoulière : Comme tout le monde l’a observé, les Françaises font une très bonne première mi-temps face aux Anglaises, avant que ces dernières arrivent à mieux maîtriser leur rugby pour l’emporter. Contrairement aux Championnes du monde, nous n’avons pas su concrétiser nos temps forts. La constance n’est pas régulière pour être en capacité de battre les grandes nations. Les Blackferns, pour la petite finale, ont su tirer les leçons de leur match perdu contre cette belle équipe du Canada. Contrairement aux Françaises, cette équipe a joué son rugby en marquant énormément de points.
« Ne pas enfermer les filles dans des schémas de jeu »
7 Jours à Clermont : Dans une chronique, Marjorie Mayans souligne le fait que les filles n’arrivent pas à sortir des schémas de jeu imposés. Tu es d’accord avec cela ?
Jessy Trémoulière : Oui, exactement. On préétabli des choix de jeu par rapport à l’adversaire qui sont utiles, certes, mais le problème est que nous n’arrivons pas à nous en défaire. Cela donne un jeu quelque peu stéréotypé. Au bout d’un moment, il faut savoir jouer aussi au rugby. Les filles s’adaptent à un projet de jeu, alors que pour moi, cela devrait être l’inverse. On enferme les filles à schématiser sur 1 , 2, 3 temps de jeu, ce qui nous fait oublier le French Flair, le savoir de jouer sur l’instant T. Ce qui se passe actuellement dans le rugby féminin, me fait penser à une époque où le rugby masculin était à la peine. Les joueurs étaient bridés dans des schémas de jeu, faisant oublier notre identité, notre culture, notre singularité et notre savoir faire.
7JàC : Cela reste un échec comme le soulignent certaines filles de l’équipe de France ?
JT : L’organisation du pays hôte a été remarquable. Il y a eu un engouement populaire extraordinaire, et la finale s’est jouée devant plus de 80000 personnes. Nous espérons que tout cela va confirmer cet élan du rugby féminin mondial. Concernant l’équipe de France, oui, c’est un échec, car la volonté était d’être Championnes du Monde. La chute est immense, c’est certain. Les filles vont faire une pause avec la scène internationale, en retournant dans les clubs et prendre du plaisir. Par la suite, il faut souhaiter faire un bon résultat lors du prochain tournoi des 6 nations. Je pensais que nous serions arrivés à tirer des leçons positives lorsque nous avons échoué d’un point contre les Anglaises lors du dernier tournoi. Mais cela n’a pas été le cas. Nous sommes à la fois si près, et si loin.
« Une grosse remise en question s’impose »
7 Jours à Clermont : Que faut-il mettre en place pour arriver à tenir tête à cette solide équipe Anglaise pleine de maîtrise, et parvenir, enfin à basculer du bon côté ?
Jessy Trémoulière : Il faudrait être en capacité de réaliser des performances comme nous l’avons vu lors de la première mi-temps, en demi-finale, face aux Anglaises. C’est compliqué d’aller titiller le petit détail, parce que pour moi, actuellement, il y a trop de manques. Nous nous mettons trop sur l’adversité, et on oublie de se focaliser sur notre jeu. Nous ne parvenons pas à corriger ces petits détails, car je crois que nous ne vivons pas notre rugby à fond. Nous nous créons des occasions, mais nous n’arrivons pas à concrétiser, car il y a toujours ce petit détail qui nous empêche d’être cliniques. On se met au niveau de l’adversaire, au lieu d’élever notre propre niveau. Les Anglaises, de leur côté, sont concentrées sur leur jeu, et à la fin, ce sont elles qui gagnent. Elles ont des bases de travail très solides.
7JàC : Pour toi, du changement s’impose à la tête de l’équipe de France ?
Jessy Trémoulière : Je ne sais pas s’il faut en passer par là, car il y a des choses qui ont quand même pas mal fonctionné. Ce qui est sur c’est que si cela continue dans cette même configuration, ça passe forcément par une grosse remise en question. Il faut faire un bilan global sur cette Coupe du Monde (staff et joueuses), en prenant l’avis de tous les acteurs concernés. Il y a un besoin d’avancer certain, le potentiel est là, mais il faut que chacune arrive à jouer libérée. Il faut arrêter de les enfermer dans des schémas de jeu, qui provoquent de l’agacement et de la frustration. C’est un cercle vicieux, car les émotions négatives qui en découlent ont forcément un impact sur le collectif. Il faut arriver à être soi-même.












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