1972 : un grand cru dans l’histoire du circuit de Charade. Non seulement cette année-là, la piste clermontoise accueille son tout dernier Grand-Prix de Formule 1 mais il reçoit aussi, deux mois auparavant, le championnat du monde moto. En ce début des années 70, la discipline a son maître incontesté : l’Italien Giacomo Agostini. Il domine de la tête et des épaules les catégories 350 cm3 et 500. Une suprématie qui engendre la monotonie : en effet au guidon de sa MV Agusta, il dispose d’une machine officielle quand ses principaux concurrents doivent se contenter de machines privées. Toutefois, deux semaines avant le rendez-vous auvergnat, la terre a tremblé sur le terrible Nürburgring où, pour la première fois, le roi a mis un genou à terre devant un impétrant au style flamboyant : Jarno Saarinen. Sur un circuit où le pilotage prend le pas sur la puissance pure des motos, l’Italien a cédé face au talent éblouissant du « Finlandais volant. »
Le Grand-Prix de France ne pouvait mieux s’annoncer. On qualifie souvent Charade de petit Nürburgring et l’on attend avec délice le duel entre les deux hommes dans l’épreuve des 350 cm3, dont l’affiche est beaucoup plus alléchante que les 500 où les MV ne rencontrent guère d’opposition. En ce premier dimanche de mai, le temps a viré au gris. Ce qui n’a pas dissuadé 70.000 spectateurs, environ, de se masser autour du circuit. Tandis que le peloton des 350 rejoint la grille de départ, la pluie s’est mise à tomber. Un élément naturel qui a toujours permis aux plus fins pilotes d’émerger.
Cavalier seul
Sur l’asphalte humide du tracé des Monts d’Auvergne, Saarinen, sur sa Yamaha privée de l’importateur finlandais Arwidson, semble voler sur l’eau tandis que ses adversaires pataugent ou se noient. Agostini n’est que l’ombre du campionissimo : le « flying finn » le relègue à raison de quinze secondes par tour. Un gouffre… Le champion du monde prend le bouillon. Longtemps troisième, il finit par se faire dépasser par l’Aermacchi de son compatriote Renzo Pasolini. Saarinen, lui, file vers la victoire en funambule, dans un style que lui a inspiré sa fréquentation passée des courses sur glace, le genou au ras de l’asphalte. A l’arrivée, il devance un autre Finlandais, son ami Teuvo Lansivuori, de 30 secondes. Pasolini et Agostini sont relégués à 2’15. La grande majorité des concurrents a du concéder plus d’un tour.
Les autres catégories, beaucoup plus serrées, voient les victoires de Parlotti (125), Read (250), Agostini (500) devant le Français Bourgeois (en l’absence de la deuxième MV de Pagani) et de Luthringauser-Cusnik (side car).
Le drame de Monza
Le talent éclatant de Jarno Saarinen (champion du monde 250 en 1972) amènera Yamaha à faire son retour officiel en grand-prix dès la saison suivante. Le Finlandais, qui dominera outrageusement le début de saison, restera hélas une étoile filante. Il connaîtra une fin tragique à Monza, le 20 mai, au cours du plus effroyable accident qu’ait connu le « Continental Circus », tout comme Renzo Pasolini. Quant aux motos de grand-prix, elles reviendront une dernière fois sur le circuit de Charade, en 1974…
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