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Pierre Raufast : "j'avais envie de découvrir d'autres expériences."
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Pierre Raufast : « J’écris pour inventer un monde et jouer avec… »

Entretien avec l'écrivain clermontois Pierre Raufast, à l'occasion de la sortie de son cinquième roman, "Le Cerbère Blanc". Publié chez Stock dans la collection Arpège, en mars dernier.

Cinq romans. Aux titres souvent décalés. Qu’on ne lâche pas et qui finissent trop vite, regrettent ses lecteurs. Signe de leur succès, la plupart sont disponibles en Folio. Un phénomène, Pierre Raufast qui, après un séjour chez Alma Editeur, vient de signer chez Stock pour un cinquième roman, Le Cerbère Blanc. Parcours atypique que celui de cet ingénieur en informatique chez Michelin, que rien, à première vue, ne semblait prédisposer à l’écriture. Conclusion : se méfier des « à première vue« . Ce qui est sûr, c’est que, pour ses lecteurs, Pierre Raufast est un merveilleux conteur, mêlant imaginaire, culture et burlesque sur fond de thématiques contemporaines. Pierre Raufast, quel écrivain êtes-vous  ?

7 JOURS A CLERMONT :  Faisons le point sur votre actualité : des changements, pour vous, cette année, il y en a : une signature chez Stock et un cinquième roman, « Le Cerbère Blanc », sorti en mars dernier dans la collection Arpège. Quelles sont les raisons de ce changement de maison d’édition ?

PIERRE RAUFAST : J’ai vraiment beaucoup apprécié l’aventure Alma et remercie vivement l’équipe. Mais après quatre romans chez eux, j’avais envie de découvrir d’autres expériences. Je suis encore récent dans le milieu et reste curieux de connaître un autre contexte, une autre maison, d’autres pratiques.

7JC : Comment ce cinquième roman est-il accueilli par le public ? 

P.R : Sa sortie est très mal tombée ! (le 4 mars). Dix jours après, les librairies fermaient. Je suis donc encore dans le brouillard en ce qui concerne l’accueil des lecteurs. Ce n’est pas une situation très agréable pour un auteur ; voir son travail de plusieurs années passer ainsi sous les radars, mais il y a en ce moment des choses plus graves que cela.

7JC :   Commençons par le début : votre entrée en littérature. Vous avez une formation scientifique. L’envie d’écrire vous est venue quand, comment ? Pourquoi écrit-on, selon vous?

P.R : Après avoir inventé pendant des années des histoires à mes deux jeunes filles, j’ai voulu en écrire. J’ai débuté par des concours de nouvelles pour me faire la main. Puis j’ai écrit mon premier roman, La fractale des raviolis, rédigé entre 2011 et 2012, publié en 2014.

J’écris avant tout par plaisir, pour assouvir mon besoin de créativité. Inventer un monde et jouer avec. L’écriture, comme toute passion, est un passe-temps formidable pour se ressourcer.

7JC : Le style fait l’écrivain. Le vôtre tient du mélange des genres, de la vulgarisation, du décloisonnement. Ça vous a pris du temps pour le créer ? Quelles sont vos influences ?

P.R :  N’étant pas de formation littéraire, je me suis mis à écrire presque « par accident », comme un auto-didacte, sans avoir de stratégie d’écriture ou de style. Certains auteurs m’ont évidemment inspiré, notamment le réalisme magique sud américain. J’adore les digressions de Gabriel Garcia Marquez, le ton jovial de Jorge Amado, le fantastique de Jorge-Luis Borges.

7JC : Vos lecteurs l’affirment, vous êtes un merveilleux conteur. Comment construisez-vous vos romans ? Lors d’un interview, vous disiez « (…) partir de faits réels et les pousser jusqu’à l’absurde. » Cette méthode, vous l’appliquez à tous vos romans ?

P.R : Je passe beaucoup de temps en amont de l’écriture à bâtir la structure du livre. Je considère que c’est très important et cela me permet d’écrire assez rapidement une fois que je sais où je vais. Rien n’empêche ensuite des changements de cap, mais je crois que cela me rassure, un peu comme dans mon métier d’origine : on n’improvise pas quand on doit écrire un logiciel. Ensuite, j’aime avoir les pieds sur terre mais la tête dans les étoiles. À partir d’une base réelle, j’entraîne les lecteurs dans une zone imaginaire. Mais la frontière entre les deux mondes vient progressivement ; alors, à un moment, le lecteur se demande inévitablement ce qui est vrai et ce qui est fiction. Cela m’amuse beaucoup.

7JC : Vos personnages vivent des aventures romanesques sur fond de sujets contemporains sérieux. D’où vous vient cet imaginaire très riche ?

P.R : J’observe et je note ce qui me plait. J’ai un petit carnet avec mes idées. Quand la besace est pleine, je sais que j’ai suffisamment d’idées pour écrire un nouveau roman. Je ne crois pas à l’inspiration qui vient devant sa feuille blanche. Les idées nous tombent dessus à n’importe quel moment sans prévenir ; il faut alors être à l’écoute et … prêt à les noter.

7JC : Vous marquez un intérêt certain pour l’humain. La vie. Son sens. La curiosité sur le monde, ça tient quelle place dans la vie d’un écrivain ? 

P.R : J’imagine que ce sont des questions que tout le monde se pose. Pourquoi est-on là ? Quelle est le sens de cette course effrénée du monde ? Comment connaître sa place ? Bien entendu, personne n’a la réponse. Il faut se contenter de grappiller des éléments de vérité par ci, par là. Rester humble et observer. Dans mon roman, le cerbère blanc a trois têtes : une pour observer, l’autre pour écouter et la dernière pour parler. Voici ma ligne guide.

7JC : Si on parlait du ton : vos romans sont jubilatoires, plein de fantaisie, d’humour, de poésie. Et même s’ils peuvent aborder des sujets graves, c’est avec sensibilité et distanciation. Ce type de traitement, c’est important pour vous ? 

P.R: Oui, j’aime écrire comme je perçois la vie : un patchwork indissociable de  moments joyeux, malheureux, sérieux, cocasses ou poétique.  Si l’écriture est le reflet de la vie, alors elle doit être ainsi. Je n’aime pas les traitements monolithiques d’un sujet (grave ou léger), car la réalité n’est pas si linéaire.

7JC : A propos de votre nouveau roman, Le Cerbère Blanc. Comment l’avez-vous travaillé ? En particulier, la psychologie de vos personnages ?   

P.R :  J’ai essayé beaucoup d’idées différentes. J’ai écrit plusieurs versions afin de trouver celle qui fonctionnait le mieux. J’ai aussi demandé des conseils. C’est pour moi une aide très importante, surtout quand il s’agit de ciseler la psychologie féminine, sujet sensible. J’ai travaillé avec une amie écrivaine, puis avec mon éditrice.

7JC : Vos romans sont bien accueillis. Avez-vous des retours de vos lecteurs ? Des propositions d’adaptations ?

P.R : C’est quelque chose d’extraordinaire que j’ai découvert en allant à la rencontre de mes lecteurs dans les librairies. Chacun a sa façon de s’approprier l’histoire et les personnages. J’en ai conclu que je ne pourrai jamais faire une fin qui fasse l’unanimité (rire). J’aime écouter leurs interprétations, comment ils ont vibré à l’unisson des personnages. C’est très instructif, parfois décapant et souvent contraire aux idées reçues !

Côté adaptation, la variante chilienne a été adaptée au théâtre par des élèves du conservatoire de Nogent-sur-Marne, c’était vraiment très sympa. J’ai hâte d’avoir d’autres propositions.

Liens: https://raufast.wordpress.com

http://raufast.org/

À propos de l'auteur

Sandrine Planchon

Après une prépa lettres et des diplômes en sciences humaines, Sandrine Planchon s'oriente vers la radio. Depuis 1999 elle travaille différents formats sur Altitude, Arverne, RCF, RCCF. Investie depuis 2015 dans un projet sur le numérique avec Elise Aspord, historienne de l'art, elle encadre aussi depuis 2014 les projets d'étudiants du Kalamazoo College (US).

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