La nuit, les morts restent entre eux et nul ne sait vraiment ce qui se passe alors au détour des allées ou dans le dédale des tombes. Quand le matin revient, les portes du cimetière des Carmes rouvrent. Il est 8h30 à la belle saison, 9h en automne et en hiver…Les vivants reprennent alors possession du lieu, un espace de 11 hectares à la croisée des chemins et des destins, entre l’ancienne cité de Clermont et celle de Montferrand, là où coule la Tiretaine.
Blatin prend ses quartiers
On le sait, le cimetière des Carmes est le plus vaste, le plus célèbre du territoire clermontois. Certains l’ont d’ailleurs qualifié de Père Lachaise local, tant il a accueilli d’illustres dépouilles et de notables chagrins. Au fil des 108 allées, sur le marbre des monuments funéraires, on découvre ainsi des noms qui ont profondément marqué l’histoire de la cité. Antoine Blatin, par exemple, qui a donné son nom à une rue du centre-ville. Il fut maire de Clermont entre 1822 et 1830 … C’est lui qui, alors adjoint au maire, fut à l’origine du cimetière des Carmes en 1816. Il décida, en effet, du rachat de l’enclos de l’abbaye des carmes déchaussés pour y implanter un cimetière, en remplacement d’autres lieux devenus vétustes.
Défunts locataires
Marcel Michelin est enterré aux Carmes à quelques centaines de mètres du stade qui porte son nom… Résistant durant la seconde guerre mondiale, il mourut au camp d’Ohrdrue. Auparavant, il avait géré la société d’exportation Michelin et créé l’ASM en 1922, décidant aussi d’implanter un stade Avenue de la République. Les jours de matches, on peut entendre depuis le cimetière les applaudissements et les encouragements de la foule « jaune et bleue ».
Architectes, artistes, hommes d’affaire, hommes politiques, ils sont ainsi des dizaines, résidants inertes du cimetière à avoir laissé leur empreinte sur l’histoire clermontoise… et parfois nationale, tel Agénor Bardoux, mort en 1897, qui fut tour à tour bâtonnier de l’ordre des avocats, maire de Clermont, député du Puy-de-Dôme, ministre de l’instruction publique, des cultes et des Beaux-Arts puis président du Conseil Général et sénateur. Père de Jacques Bardoux, lui-même brillant homme politique (enterré à Saint-Saturnin), il n’est autre que l’arrière-grand-père de Valéry Giscard d’Estaing.
Le cimetière des Carmes fut agrandi à plusieurs reprises au fur et à mesure de son histoire. La dernière extension remonte ainsi à 1908, annexant un terrain situé au nord de la Tiretaine L’ensemble comprend aujourd’hui environ 6000 concessions. Celles-ci ne sont plus, comme jadis, accordées de façon perpétuelle ou centenaire mais pour une durée de 15, 30 ou 50 ans. Elles demeurent toutefois renouvelables contre redevance. Les morts sont ainsi de simples locataires, soumis aux lois impitoyables de l’économie. Même dans les cimetières, l’éternité n’existe pas…
Excellent article, cher Marc François. Notre cimetière ressemble effectivement au Père-lachaise, plus célèbre il est vrai. Pour s’en convaincre, je conseille de lire l’ouvrage de Pascal Piéra et Daniel Lamotte paru en 2004, « Le cimetière des Carmes à Clermont-Ferrand », une mine de renseignements richement illustrée.
Mais on peut préférer des cimetières plus champêtres ( et moins démoralisants ) dans le département tel que celui de Chambon sur lac et sa belle chapelle ronde médiévale ou celui qui vient de faire parler de lui à son corps défendant: le cimetière de St Floret. Il est connu pour ses tombes-sarcophages à même creusées dans la roche et son ossuaire tout récemment profané. Ces 2 lieux ont en commun d’offrir une vue magnifique vers nos montagnes du Sancy.
des allées sans retour !